Acquisition des droits impérative

Les « œuvres audiovisuelles » classées X n’échappent pas à la nécessité d’obtenir, du producteur de phonogramme,  les droits de sonorisation selon le support de diffusion concerné (DVD, télédiffusion …). La société Marc Dorcel a été condamnée pour contrefaçon pour sonorisation de plusieurs films X sans avoir obtenu l’autorisation de l’auteur / compositeur / producteur de l’oeuvre musicale (musique électronique).

Protection de la musique Lounge

Sur la question de l’originalité, les juges ont dénoncé la position de l’expert qui, dans son rapport privé, a conclu à l’absence d’originalité du genre musical dit « lounge » auquel appartient l’oeuvre ayant servi, sans autorisation,  à sonoriser des films X : «  ce style de musique est avant tout une musique formatée relevant d’un style musical privilégiant des réglages de timbres sonores standardisés, soutenus par une formule rythmique toujours égale dans sa durée » et que « les musiques de ce style ne recherchent pas une originalité particulière, mais plutôt un formatage leur permettant, en utilisant les poncifs du genre, une classification de genre ».

Or, l’originalité ou, à l’inverse, l’absence d’originalité d’une oeuvre ne peuvent résulter du seul constat du genre (non protégeable en tant que tel par le droit d’auteur) auquel appartient cette oeuvre et il convient de rechercher si ladite oeuvre, considérée en elle-même, répond à l’exigence d’originalité pouvant lui octroyer une  protection au titre du droit d’auteur, c’est à-dire qu’elle soit le résultat d’une création intellectuelle propre à son auteur permettant à celui-ci d’exprimer son esprit créateur de manière originale.

Originalité d’une œuvre musicale

L’originalité d’une oeuvre musicale peut se révéler dans sa mélodie (c’est-à-dire le canevas général de l’oeuvre) dès lors que cet air est identifiable (peu important son mérite ou sa destination). L’harmonie (émission simultanée d’accords) et le rythme (cadence de l’oeuvre) juxtaposés entre eux ou à la mélodie peuvent également être protégeables. A ce titre,  l’article L 112-2 5° du code de la propriété intellectuelle inclut dans les oeuvres de l’esprit « les compositions musicales avec ou sans paroles ».

Contrefaçon d’une musique électronique

Et en l’occurrence, l’œuvre musicale électronique était bien originale. L’ensemble des choix esthétiques et arbitraires du compositeur était le résultat d’une création intellectuelle permettant à celui-ci d’exprimer son esprit créateur de manière originale.

Le recours à des instruments ou à des outils pour la création ne fait pas obstacle à la protection d’une oeuvre musicale, la composition musicale assistée par ordinateur, dès lors qu’elle implique comme en l’espèce une intervention humaine et des choix de l’auteur, conduisant à la création d’une oeuvre originale et comme telle protégeable, quelle que soit l’appréciation sur son mérite ou sa qualité qui est indifférente.

Violation des droits d’Artiste-interprète

Le compositeur de la musique électronique disposait de plusieurs « casquettes » : artiste, compositeur et producteur.

L’article L 212-1 du code de la propriété intellectuelle définit l’artiste-interprète comme étant « la personne qui représente, chante, récite, déclame, joue ou exécute de toute autre manière une oeuvre littéraire ou artistique, un numéro de variétés, de cirque ou de marionnettes » ; cette définition reprend celle donnée par l’article 3, sous a) de la Convention de Rome sur la protection des artistes interprètes ou exécutants, des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion du 26 octobre 1961 (« les acteurs, chanteurs, musiciens, danseurs et autres personnes qui représentent, chantent, récitent, déclament, jouent ou exécutent de toute autre manière des oeuvres littéraires ou artistiques »).

La prestation était protégée au titre du droit voisin de l’artiste-interprète : l’auteur a interprété son œuvre  à partir d’un synthétiseur relié à un ordinateur pour générer des timbres ou des sons (voix, piano, trompettes bouchées, etc) et qu’à part la partie rythmique (au demeurant très certainement modifiée à partir de l’ordinateur), aucune mélodie ou harmonie n’a été générée par un programme, de telle sorte qu’il a joué au synthétiseur l’intégralité des différents passages constituant cette œuvre.

Violation des droits de producteur musical

L’article L 213-1 du code de la propriété intellectuelle définit le producteur de phonogrammes comme étant « la personne, physique ou morale, qui a l’initiative et la responsabilité de la première fixation d’une séquence de son ». L’article 2, sous c) du Traité de l’OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes du 20 décembre 1996 définit la fixation  comme étant « l’incorporation de sons, ou des représentations de ceux-ci, dans un support qui permette de les percevoir, de les reproduire ou de les communiquer à l’aide d’un dispositif » et l’article 3, sous b) de la Convention de Rome définit le phonogramme comme étant « toute fixation exclusivement sonore des sons provenant d’une exécution ou d’autres sons ».

Ni la Convention de Rome, ni le Traité de l’OMPI ne posent l’existence d’un support matériel dans leurs définitions, de telle sorte qu’au sens de ces dispositions, la qualification juridique de phonogramme est indépendante de l’existence ou non d’un support tangible.

L’auteur compositeur en ayant pris l’initiative et la responsabilité de la première fixation de l’oeuvre musicale en ligne sur le site Internet Audiofanzine et sur DVD a pu également revendiquer la protection au titre du droit voisin de producteur de phonogramme de son œuvre.

Contrefaçons multiples

En reproduisant sur les DVD litigieux la musique électronique en cause, sans l’autorisation de son titulaire, en produisant et en diffusant les deux films cinématographiques où figure cette reproduction, que ce soit par commercialisation des DVD, par location des DVD ou par transmission en VOD ou téléchargement en ligne, les sociétés JTC et Marc Dorcel ont donc commis des actes de contrefaçon des droits d’auteur et des droits voisins d’artiste-interprète et de producteur de phonogramme de l’auteur.

En ce qui concerne la protection au titre du droit d’auteur, l’article L 121-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que « l’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre » et le droit d’exploitation lui appartenant comprend le droit de représentation et le droit de reproduction, la reproduction consistant, en la fixation matérielle de l’oeuvre par tous procédés qui permettent de la communiquer au public d’une manière indirecte.

Au titre des droits voisins (article L 212-2 du CPI) « l’artiste-interprète a le droit au respect de son nom, de sa qualité et de son interprétation » et  sont soumises à son ‘autorisation écrite, la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public.

L’autorisation du producteur de phonogrammes est requise avant toute reproduction, mise à la disposition du public par la vente, l’échange ou le louage, ou communication au public de son phonogramme.

Pour l’ensemble de ces violations, l’auteur a obtenu la somme de 20 000 euros à titre de  dommages et intérêts.

[toggles class=”yourcustomclass”]

[toggle title=”Télécharger la Décision” class=”in”]

Télécharger 

[/toggle]

[toggle title=”Poser une Question”]

Poser une question sur cette thématique, la rédaction ou un abonné vous apportera une réponse en moins de 48h

[/toggle]

[toggle title=”Paramétrer une Alerte”]

Paramétrer une alerte jurisprudentielle, pour être informé par email lorsqu’une décision est rendue sur ce thème

[/toggle]

[toggle title=”Commander un Casier judiciaire”]

Commander un bilan judiciaire sur l’une des personnes morales citées dans cette affaire (ou sur toute autre personne morale).

[/toggle]

[acc_item title=”Reproduction”]

Copier ou transmettre ce contenu

[/toggle]

[toggle title=”Vous avez traité un dossier similaire?”]

Maître 

[/toggle]

[/toggles]

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Please fill the required fields*