L’une des émissions de la série « Faites entrer l’accusé » été consacrée à l’affaire judiciaire dite des « Paras de Francazal » qui a connu à l’époque des faits un fort retentissement médiatique.  Thierry Le B. st l’un des quatre auteurs de ces faits de meurtres et de viols en réunion commis en 1989 et pour lesquels il a été condamné par la cour d’assises de Haute-Garonne à la peine de réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 30 ans.

Ce dernier a poursuivi le diffuseur de l’émission aux motifs que les images issus d’archives le représentant à l’époque des faits, alors qu’il est âgé de 19 ans, et les éléments faisant état des péripéties de sa vie familiale, sont attentatoires à son droit à l’image de sa vie privée en soulignant qu’après avoir exécuté plus de 21 ans de sa peine, il a été placé depuis le mois d’avril 2013 sous surveillance électronique probatoire à une libération conditionnelle.

Image des prisonniers

Le condamné a excipé sans succès de l’article 41 de la loi du 24 novembre 2009, dite loi pénitentiaire, selon laquelle « les personnes détenues doivent consentir par écrit à la diffusion ou à l’utilisation de leur image de leur voix lorsque cette diffusion ou cette utilisation et de nature à permettre leur identification… ».  Ce texte n’a en réalité vocation à s’appliquer qu’aux images représentant des personnes en situation de détention, ce que ne contredit ni les travaux parlementaires ni la réponse évoquée ci-dessus; or, les seules images de Monsieur El B. apparaissant dans le documentaire sont soit des photographies d’identité prises à l’époque de son service militaire, soit des images tournées pendant le procès d’assises en avril 1991 et non pendant son incarcération.

Sur l’atteinte à l’image, l’article 9 du Code civil doit se concilier avec le droit à la liberté d’expression tel que le prévoit l’article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme ; la relative ancienneté des faits évoqués n’exclut pas que le sujet traité relève de l’intérêt légitime du public ; en effet l’affaire criminelle traitée par le documentaire a connu un retentissement exceptionnel, l’extrême gravité des faits ayant conduit à prononcer les peines les plus lourdes depuis l’abolition de la peine de mort sinon même à relancer le débat sur cette abolition ; elle illustre, en outre, les difficultés qu’ont rencontrées les autorités judiciaires pour enquêter au sein de l’institution militaire ; les seules images du demandeur, contemporaines de ces faits, alors qu’il était âgé 21 ans, et dont il n ‘est pas contesté qu’elles illustrent de façon pertinente le sujet traité sans présenter de caractère dégradant, ne revêtent donc pas de caractère fautif.

Respect de la vie privée et droit à l’oubli

Sur le respect de la vie privée et le droit à l’oubli, les éléments de la vie privée de Thierry El B. qui sont évoqués dans l’émission sont exclusivement limités à ce qui a été publiquement et licitement évoqué à l’époque dans le cadre de la relation des faits criminels et des comptes rendus des débats judiciaires ; aucun élément de sa vie actuelle n’est révélé.

Le droit à l’oubli qu’il invoque et qui conduirait à interdire que soient évoqués, même de façon objective et prudente, à compter d’ une période indéterminée , des faits criminels d’une exceptionnelle gravité et les procès en ayant résulté, sujets dont il ne peut être contesté qu’ils suscitent, quelle que soit l’époque à laquelle ils se sont produits, l’intérêt légitime du public, en ce qu’ils conduisent à s’interroger sur des parcours individuels devenus criminels et sur la réponse que la justice y a apporté, ne saurait prévaloir sur le droit du public à l’information.

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