La délivrance de certificats médicaux d’arrêt maladie à partir d’un service en ligne établi en Allemagne est une pratique illégale. Attention toutefois à suivre la procédure de notification des décisions au sein de l’UE fin d’obtenir une condamnation exécutable par les juridictions françaises (ce que la CPAM a omis de faire dans cette affaire).

Affaire arretmaladie.fr

La société Dr. [W] AU-Schein GmbH, basée en Allemagne, offre depuis 2018 un service en ligne de délivrance de certificats d’incapacité, de certificats d’auto-test Corona et d’ordonnances de médicaments. Cette offre, étendue au territoire français via le site arretmaladie.fr, repose sur des questionnaires intelligents vérifiés par des médecins, avec ou sans chat vidéo.

Sanctions et interdictions en Allemagne

L’office central de la concurrence en Allemagne et les juridictions allemandes ont prononcé des condamnations le 19 novembre 2019, le 21 juillet 2020 et le 19 octobre 2021 à l’encontre de la pratique de délivrance de certificats sans examen médical. Ces décisions ont interdit à l’entreprise de faire de la publicité pour la délivrance de certificats de test sans contact avec un médecin.

Décision du tribunal judiciaire de Paris

Suite à des actes extra-judiciaires émis à la requête de la CNAM et du conseil national de l’ordre des médecins, le tribunal judiciaire de Paris a rendu un jugement en référé le 6 novembre 2020. Ce jugement a ordonné à la société Dr. [W] AU-Schein GmbH de fermer définitivement le site www.arretmaladie.fr dans les quinze jours suivant la signification de la décision, sous astreinte.

La CPAM a toutefois omis de suivre la procédure de notification des actes à l’étranger.

Procédures de notification des actes à l’étranger

L’article 688 du code de procédure civile, concernant les notifications des actes à l’étranger, établit les conditions dans lesquelles un juge peut statuer au fond en l’absence de preuve de remise de l’acte introductif d’instance. Il précise également les mesures provisoires ou conservatoires pouvant être ordonnées pour la sauvegarde des droits du demandeur.

En application de l’article 688 du code de procédure civile relatif aux notifications des actes à l’étranger, qui reprend les dispositions de l’article 15 de la convention de La Haye et celles de l’article 22 du règlement (UE) 2020/1784 :

La juridiction est saisie de la demande formée par assignation par la remise qui lui est faite de l’acte complété par les indications prévues à l’article 684-1 ou selon le cas, à l’article 687-1, le cas échéant accompagné des justificatifs des diligences accomplies en vue de sa notification au destinataire.

S’il n’est pas établi que le destinataire d’un acte en a eu connaissance en temps utile, le juge saisi de l’affaire ne peut statuer au fond que si les conditions ci-après sont réunies :

1° L’acte a été transmis selon les modes prévus par les règlement européen ou les traités internationaux applicables ou, à défaut de ceux-ci, selon les prescriptions des articles 684 à 687 ;

2° Un délai d’au moins six mois s’est écoulé depuis l’envoi de l’acte ;

3° Aucun justificatif de remise de l’acte n’a pu être obtenu nonobstant les démarches effectuées auprès des autorités compétentes de l’Etat où l’acte doit être remis.

Le juge peut prescrire d’office toutes diligences complémentaires, notamment donner commission rogatoire à toute autorité compétente aux fins de s’assurer que le destinataire a eu connaissance de l’acte et de l’informer des conséquences d’une abstention de sa part.

Toutefois, le juge peut ordonner immédiatement les mesures provisoires ou conservatoires nécessaires à la sauvegarde des droits du demandeur.

Ce dernier alinéa, introduit la possibilité pour le juge de prendre des mesures sans attendre la preuve de la remise de l’acte introductif d’instance, mais celles-ci doivent être provisoires ou conservatoires, ce qui exclut que le juge puisse prendre des mesures – telle que la fermeture d’un site internet – dont le caractère provisoire ne serait pas garanti et qui sous couvert de mettre fin à un trouble manifestement illicite, donneraient définitivement satisfaction au demandeur, par leur caractère irréversible.

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