22 mars 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
16-16.539

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 22 mars 2017

Rejet non spécialement motivé

Mme BATUT, président

Décision n° 10204 F

Pourvoi n° G 16-16.539

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par M. [L] [X], domicilié [Adresse 1],

contre l’arrêt rendu le 3 mars 2016 par la cour d’appel de Douai (chambre 7, section 2), dans le litige l’opposant à Mme [T] [O], domiciliée [Adresse 2],

défenderesse à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 21 février 2017, où étaient présents : Mme Batut, président, Mme Gargoullaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Matet, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [X], de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de Mme [O] ;

Sur le rapport de Mme Gargoullaud, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. [X] aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à Mme [O] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille dix-sept.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. [X].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué statuant par voie de dispositions nouvelles d’avoir dit que M. [L] [X] exercera son droit de visite sur les enfants [H] et [R] [X] à l’espace rencontre, point rencontre Centre directionnel à Hazebrouck avec autorisation de sortie après au minimum huit rencontres entre le père et les enfants,

AUX MOTIFS QUE Les articles 373-2 et 373-2-1 du code Civil énoncent qu’en cas de séparation des parents, chacun des père et mère doit entretenir des relations personnelles avec l’enfant ; l’exercice du droit de visite et d’hébergement ne peut être refusé à celui des parents chez lequel ne demeure pas l’enfant que pour des motifs graves ; Lorsque l’intérêt de l’enfant le commande ou lorsque la remise directe de l’enfant à l’autre parent présente un danger pour l’un d’eux, le juge en organise les modalités pour qu’elle offre toutes les garanties nécessaires. Il peut prévoir qu’elle s’effectue dans un espace de rencontre qu’il désigne, ou avec l’assistance d’un tiers de confiance ou du représentant d’une personne morale qualifiée. Mme [O] démontre que les enfants sont dans la crainte de leur père et ne veulent plus le voir. Le droit de visite et d’hébergement selon des modalités élargies ne répond pas à l’intérêt des mineurs. Il convient au contraire de limiter les contacts père-enfants, en raison des perturbations subies par les deux mineurs. Malgré les possibilités d’accueil que M. [X] peut offrir au niveau matériel. [H] et [R] doivent pouvoir rencontrer leur père dans un lieu neutre et sécurisant. La décision entreprise doit être confirmée en ce qu’elle a prévu un droit de visite et d’hébergement selon des modalités élargies dès lors que la modification des droits du père ne peut s’opérer avec un effet rétroactif. Il convient de statuer, par voie de dispositions nouvelles et de prévoir que le père exercera un simple droit de visite sur [H] et [R], en espace-rencontre, selon les modalités précisées au dispositif de la présente décision ».

ALORS D’UNE PART QUE devant le tribunal, comme devant la cour, les parties n’ont sollicité que l’aménagement du droit de visite et d’hébergement de M. [X], et non point la suppression du droit d’hébergement du père au profit d’un seul droit de visite dans un lieu médiatisé et dans des conditions extrêmement restrictives ; qu’en statuant donc comme elle l’a fait, sur le seul appel de M. [X], la cour d’appel a méconnu les termes du litige, ensemble les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

ALORS D’AUTRE PART QUE l’arrêt ne pouvait sans se contredire ou mieux s’en expliquer, relever d’une part que le droit de visite et d’hébergement selon des modalités élargies ne répond pas à l’intérêt des mineurs, tout en indiquant d’autre part que la décision entreprise doit être confirmée en ce qu’elle a prévu un droit de visite et d’hébergement selon des modalités élargies dès lors que la modification des droits du père ne peut s’opérer rétroactivement tout en estimant devoir statuer par voie de dispositions nouvelles et prévoir que le père exercera un simple droit de visite sur [H] et [R] en espace rencontre ; qu’en effet non seulement le tribunal était tout à fait libre de statuer comme il l’entendait sur les modalités du droit de visite et d’hébergement élargi, nonobstant les termes de la décision provisoire, mais encore la cour d’appel ne pouvait, sans se contredire, déclarer confirmer la décision du premier juge sur ce point tout en modifiant et restreignant les modalités d’exercice du droit de visite et d’hébergement qui avaient été retenues par le tribunal au bénéfice de M. [X] ; que la contradiction de motifs équivalent à un défaut de motifs, l’arrêt a méconnu le dispositions de l’article 455 du code de procédure civile,

ALORS ENFIN QUE la cour n’a pas caractérisé des motifs graves justifiant la suppression du droit d’hébergement du père et l’encadrement de son droit de visite ; qu’en effet la circonstance selon laquelle les enfants craignent leur père et ne veulent pas le voir ne saurait constituer les motifs graves permettant de porter atteinte dans l’intérêt des enfants au droit de chacun des père et mère d’entretenir librement des relations personnelles normales avec leurs enfants ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a méconnu les articles 373-2 et 373-2-1 du code civil, ensemble l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir fixé à la somme de 200 € le montant mensuel de la pension alimentaire que doit verser M. [L] [X] au titre de la contribution à l’entretien de chacun de ses deux enfants, et dit que ce montant sera dû à compter de la présente décision,

AUX MOTIFS QU’ « Il résulte de la combinaison des articles 203, 310, 371-2 et 373-2-2 du Code Civil qu’en cas de séparation des parents, la contribution à l’entretien et l’éducation de l’enfant prend la forme d’une pension alimentaire fixée à proportion des ressources de chacun des parents ainsi que des besoins de l’enfant, lesquels sont prioritaires dans l’organisation du budget de la famille. Cette obligation ne cesse pas de plein droit lorsque l’enfant devient majeur ; La situation des parties s’analyse au jour de la demande ; Mais de par l’effet dévolutif de l’appel, la Cour doit aussi prendre en considération les modifications intervenues dans la situation des parties jusqu’à l’ordonnance de clôture. Par ailleurs, il importe de rappeler que tous doivent supporter des taxes (foncières, d’habitation ou autres) et les charges usuelles de la vie courante, qu’il leur revient de les adapter à leurs ressources, et qu’il incombe à chaque parent de moduler son recours aux crédits en fonction de ses revenus et autres charges incompressibles, l’obligation alimentaire prévalant sur toutes les autres. Enfin, il n’incombe pas aux compagne et compagnon éventuels des parents d’assurer l’entretien et l’éducation des enfants de leur concubin(e). Cette situation de fait ne doit être prise en compte qu’au regard du partage des charges usuelles de la vie courante.

Sur les revenus et charges des parties : devant la Cour, les revenus et charges des parties se présentent comme suit :

Pour M. [X] : => Ressources : Il a bénéficié d’un revenu net imposable de 23.475 euros en 2013, selon l’avis d’imposition 2014 soit 1.956 euros par mois. Ce montant est supérieur au cumul net imposable figurant sur le bulletin de paie de décembre 2013. Selon le bulletin de paie de décembre 2014, il a perçu un revenu net imposable de 26.107 euros en 2014 en qualité de moniteur-éducateur de l’AAES, soit 2.175 euros par mois. —> Charges : – prêt immobilier : 702,88 euros – prêt automobile : 197,31 euros. Pour Mme [O] : => Ressources : Elle a bénéficié d’un revenu net imposable de 20.260 euros en 2013, selon l’avis d’imposition 2014 soit 1.688 euros par mois. Elle a bénéficié d’un revenu net imposable de 20.440 euros en 2014, selon l’avis d’imposition 2015 soit 1.703 euros par mois. => Charges : Elle est mariée depuis le [Date mariage 1] 2015 avec Monsieur [J] [V] et partage donc désormais ses charges courantes, les revenus de son nouvel époux n’étant pas communiqués. Mais elle justifie que son ami avait acquis en décembre 2013 une maison distincte financée par un prêt immobilier et qu’elle ne se trouvait donc pas en concubinage à cette époque, contrairement aux allégations de l’appelant. Elle supporte seule les charges suivantes : – prêt immobilier contracté sous son seul nom: 756,30 euros – frais de scolarité d'[H] : 570 euros pour l’année scolaire 2014-2015. Eu égard aux besoins des enfants, aux revenus de Madame [O] et aux capacités financières de Monsieur [X] résultant de ses revenus et des dépenses pouvant être légitimement retenues, le premier juge a justement apprécié le montant de la contribution fixée. Toutefois, la réduction des accueils au domicile paternel décidée dans le présent arrêt est de nature à modifier le montant de la contribution du père, par voie de dispositions nouvelles. Il convient donc de fixer cette part contributive à l’entretien et à l’éducation des enfants à la somme de 200 euros par mois et par enfant à compter du présent arrêt ».

1- ALORS QUE la contribution à l’entretien de l’enfant doit être fixée en considération des seules facultés contributives des parents de l’enfant, mais aussi des besoins de celui-ci ; qu’en condamnant M. [X] à verser une somme de 200 € mensuel pour chacun de ses deux enfants, se bornant à examiner les revenus et charges des parties sans rechercher quels étaient réellement les besoins des enfants mineurs, la cour d’appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article 371-2 du code civil,

2- ALORS QUE la contribution à l’entretien des enfants est fixée au regard des ressources des deux parents et des besoins de l’enfant, le juge devant le cas échéant rechercher l’incidence des revenus des nouveaux conjoints sur les charges du parent concerné ; qu’en évaluant les ressources de Mme [O] en relevant qu’elle s’est mariée le [Date mariage 1] 2015 avec M. [V] avec lequel elle partage ses charges courantes, et que les revenus de ce dernier ne sont pas communiqués, la cour d’appel n’a pu tenir compte de l’incidence sur ses ressources des revenus du nouvel époux dont, en tous cas, il n’est pas justifié, et a privé sa décision de toute base légale au regard de l’article 371-2 al. 1er du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir ordonné l’interdiction de sortie du territoire français des enfants [H] et [R] [X] sans l’autorisation des deux parents,

AUX MOTIFS QU’« aux termes de l’article 373-2-6 du Code Civil, le juge aux affaires familiales peut notamment ordonner l’interdiction de sortie de l’enfant du territoire français sans l’autorisation des deux parents. Cette interdiction est inscrite au fichier des personnes recherchées par le procureur de république. Le parent qui sollicite cette mesure exceptionnelle doit justifier d’un risque sérieux d’enlèvement de l’enfant par l’autre parent (précédentes tentatives, menaces réitérées, absence de toute attache de l’autre parent sur le territoire français…). En effet, cette mesure qui conduit à conférer à chacun des parents un droit de “veto” sur l’organisation des déplacements de l’enfant avec l’autre ne peut être prononcée seulement pour apaiser les inquiétudes d’un parent. En l’espèce, le premier juge a constaté que M. [X] a emmené à plusieurs reprises les enfants au Maroc, notamment en août 2013 sans que cela ne pose une quelconque difficulté. Toutefois, l’évolution de la relation père-enfants ne permet plus d’envisager pour le moment de tels voyages. M. [X] qui est originaire du Maroc doit épouser une ressortissante de ce pays, les bans ayant été publiés le 5 octobre 2015. Il a également sa famille dans ce pays. Il résulte de l’attestation de Mme [I] [H] du 19 septembre 2015 qu’elle a entendu M. [X] avoir eu le projet de ne pas revenir du Maroc. Le risque d’enlèvement des mineurs en vue d’un départ à l’étranger ne peut pas être exclu, en raison de la personnalité perturbée du père, animé d’un désir de vengeance et d’une rancoeur tenace à l’égard de Mme [O]. La décision entreprise doit être infirmée sur ce point. L’intérêt des mineurs commande de faire droit à la demande de faire droit à la demande d’interdiction de sortie du territoire sans l’accord des deux parents, formulée par Mme [T] [O] »,
ALORS QUE l’interdiction de sortie du territoire sans l’accord des deux parents doit être justifiée objectivement par la nécessité de garantir la continuité, l’efficacité du maintien du lien de l’enfant avec les deux parents en cas de risque avéré que l’un des parents n’y fasse obstacle en quittant le territoire français ; qu’en l’espèce les premiers juges ont relevé que M. [X] avait emmené plusieurs fois ses enfants à l’étranger sans que cela n’ait posé de difficulté ; que l’arrêt ne fait état que d’un risque qui n’est absolument pas établi d’enlèvement des mineurs par leur père du fait d’un projet de s’établir au Maroc ; qu’en l’absence de tout précédent ou menace faisant craindre un tel enlèvement de mineurs, de tout élément concret permettant de fonder les inquiétudes de Mme [O] à ce titre, la cour d’appel n’a pu justifier sa décision au regard des articles 373-2-6 du code civil.

 

Laisser un commentaire

Your email address will not be published.

Please fill the required fields*