31 juillet 2022
Cour d’appel de Douai
RG n°
22/01297

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 22/01297 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UNP5

N° de Minute : 1308

Ordonnance du dimanche 31 juillet 2022

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [E] [U]

né le 31 Décembre 1992 à [Localité 2] – MALI

de nationalité Malienne

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 3]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence

assisté de Me Zélie HENRIOT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d’office et de M. [R] [C] interprète assermenté en langue Bambara, tout au long de la procédure devant la cour, serment préalablement prêté ce jour

INTIMÉ

MME LA PREFETE DE L’OISE

dûment avisé, absent non représenté

M. le procureur général : non comparant

MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Danielle THEBAUD, à la cour d’appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Pauline LEGROS, greffière

DÉBATS : à l’audience publique du dimanche 31 juillet 2022 à 13 h 30

Les parties comparantes ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le dimanche 31 juillet 2022 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l’aricle L 743-8 du CESEDA ;

Vu la demande de l’autorité administrative proposant que l’audience se déroule avec l’utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ;

Vu l’accord du magistrat délégué ;

Vu l’ordonnance rendue le 30 juillet 2022 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [E] [U] ;

Vu l’appel motivé interjeté par M. [E] [U] par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 30 juillet 2022 ;

Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;

Vu l’audition des parties ;

FAITS et PROCÉDURE

M. [E] [U], né le 31 décembre 1992 à [Localité 2], ressortissant malien a fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays dedestination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français et ordonnantson placement en rétention administrative pour une durée de quarante-huit heures, prononcée le 28 juillet 2022 par Mme la préfete de l’Oise, qui lui a été notié le 28 juillet 2022 à 12h20.

‘Vu l’article 455 du code de procédure civile;

‘Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-mer en date du 30/07/2022 à 11h03 rejetant le recours en annulation de la décision de placement en rétention et ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l’appelant pour une durée de 28 jours jusqu’au 27 août 2022 ;

‘Vu la déclaration d’appel du 30/07/2022 à 13h42 de M. [E] [U] sollicitant l’infirmation de la décision déférée et la main-levée du placement en rétention administrative et à laquelle il sera renvoyé pour l’exposé des moyens de l’appelant.

Au titre des moyens soutenus en appel l’étranger soulève :

– En ce qui concerne la contestation de la décision de placement en rétention :

– l’incompétence du signataire de l’acte de placement en détention,

– l’irrégularité de la décision de placement en rétention tirée du fait :

* qu’elle est insuffisament motivée en fait,

* de l’erreur d’appréciation au regard de ses garanties de représentation, et de l’absence de prise en compte par la préfecture de sa situation personnelle (enfants en France, marié article 8 de la CEDH, travail, adresse stable, suivi par la mission locale), l’absence de document de voyage en cours de validité ne pouvant justiifer un refus d’assignation à résidence,

– absence d’examen réel dela possibilité d’assignation à résidence,

– En ce qui concerne la prolongation de la rétention :

– la violation de ses droits fondamentaux par le reours injustifié à un interprétariat teléphonique pour lui notifier son placement en rétnetion (article L. 141-3 du CESEDA),

– insuffisance des diligences de l’administration en ce qu’elle n’a pas saisie les autorités maliennes,

– irrégularité de la consultation du FAED,

– irrégularité de la consultation VISABIO,

– irrecevabilité de la requête de la préfecture tenant aux pièces utiles,

– il peut bénéficier d’une assignation à résidence.

MOTIVATION

De manière liminaire il est rappelé que le juge judiciaire ne peut se prononcer ni sur le titre administratif d’éloignement de l’étranger, ni, directement ou indirectement, sur le choix du pays de destination.

Les prérogatives judiciaires se limitent à vérifier la régularité et le bien fondé de la décision restreignant la liberté de l’étranger en plaçant ce dernier en rétention, ainsi qu’à vérifier la nécessité de la prolongation de la rétention au vu des diligences faites par l’administration pour l’exécution de l’expulsion et le maintien de la rétention dans la plus courte durée possible.

Sur la recevabilité de l’appel et des moyens tirés des exceptions de procédure

L’appel de l’étranger ayant été introduit dans les formes et délais légaux est recevable.

Les articles 933 du code de procédure civile et R.743-11 du CESEDA, ne permettent, sauf indivisibilité ou demande d’annulation du jugement, que de discuter en cause d’appel des seuls moyens mentionnés dans l’acte d’appel et soutenus oralement à l’audience.

La décision du premier juge déférée ayant joint la requête en annulation de l’arrêté de placement et la demande du préfet en prolongation de la rétention, l’ensemble des moyens soutenus pourront être appréciés par la cour d’appel.

I- Sur les moyens tirés du contrôle de la légalité externe et de la légalité interne de l’arrêté initial du placement en rétention

Au titre de son contrôle, le juge judiciaire doit s’assurer que l’arrêté administratif de placement en rétention est adopté par une personne habilitée à cet effet, est fondé sur une base légale (titre d’éloignement valable) et se trouve suffisamment motivé en fait et en droit par rapport aux critères posés par l’article L 741-1 du CESEDA.

Sur la compétence de l’auteur de l’arrêté de placement en rétention

S’agissant d’une procédure civile, il appartient à l’appelant de démontrer en quoi son moyen est fondé et notamment en quoi le délégataire de l’autorité préfectorale ne disposait pas de la compétence pour signer l’arrêté de placement en rétention administrative, preuve qui n’est pas rapportée en l’espèce alors pourtant que les documents à l’appui du dit moyen sont actes administratifs accessibles visés en tête de l’arrêté de placement en rétention administrative

De manière surabondante comme le relève pertinemment le premier juge, il ressort des pièces du dossier que le signataire de l’arrêté de placement en rétention disposait de la signature préfectorale pour la période concernée.

Le moyen est inopérant.

Sur la motivation de l’arrêté de placement en rétention administrative : situation de fait et vulnérabilité

M. [U] soutient la nullité de la décision de placement en rétention du fait de l’érreur d’appréciation sur l’absence de garanties de représentation et le fait qu’il est éligible à une mesure d’assignation qui est le principe.

Il ressort des dispositions des articles L 741-1, L 741-4 et L 751-9, L 751-10, L 753-1, L 753-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’étranger, demandeur d’asile ou non, ne peut être placé en rétention qu’après une évaluation individuelle de sa situation et de son état de vulnérabilité.

Tel est le cas en l’espèce puisque l’intéressé a été entendu le 27 juillet 2017 sur sa situation personnelle et familiale, son parcours de vie ainsi que sur les éventuels critères de vulnérabilité qu’il souhaiterait mentionner et que l’acte de placement en rétention administrative mentionne les conclusions de cet entretien, et que l’arrêté de placement en rétention admnistrative reprend ces éléments, sur sa situation personnel indiqué lors de l’audition, y compris le fait qu’il a des problèmes d’estomac, outre si l’absence de passeport en cours de validité de M. [V] ne permet certes pas d’écarter automatiquement une assignation en résidence administrative, néanmoins cette seule circonstance ne caractérise pas pour autant une erreur d’appréciation

Indépendamment de toute appréciation de fond, cette motivation est suffisante en soi, le préfet n’est pas tenu de motiver sa décision sur l’ensemble des critères de personnalité de l’étranger dés lors qu’il s’appuie sur des motifs suffisants pour justifier l’inanité du recours à l’assignation à résidence.

Le moyen est rejeté.

Sur l’erreur d’appréciation de l’arrêté de placement en rétention

L’erreur manifeste d’appréciation doit s’apprécier par rapport aux éléments de fait dont disposait l’autorité préfectorale au moment où l’arrêté de placement en rétention a été adopté et non au regard des éléments ultérieurement porté à la connaissance de la cour.

Il ressort des dispositions des articles L 741-1 renvoyant à l’article L 612-3, L 751-9 et L 753-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’autorité administrative ne peut placer un étranger en situation irrégulière en rétention administrative que dans les cas et conditions des dits articles après prise en compte de son état éventuel de vulnérabilité :

1) Lorsque, de manière générale, l’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de se soustraire à l’application du titre d’éloignement dans les cas prévus par l’article L 612-3 du CESEDA.

2) Lorsque, dans le cas spécifique d’un étranger faisant l’objet d’une prise ou d’une reprise en charge par un autre pays de l’Union Européenne selon la procédure dite ‘DUBLIN III’, il existe ‘un risque non négligeable de fuite’ tel que défini par l’article L 751-10 du CESEDA et lorsque dans cette hypothèse le placement en rétention administrative est proportionné.

3) Lorsque, s’agissant d’un étranger qui a déposé une demande d’asile en France avant toute privation de sa liberté, il existe des raisons impérieuses de protection de l’ordre public ou de la sécurité nationale.

Il apparaît en l’espèce que l’arrêté préfectoral de placement en rétention a considéré, au visa de l’article L741-1 renvoyant aux cas prévus aux articles L 612-3 du CESEDA, que l’étranger appelant ne présentait pas suffisamment de garanties de représentation pour attendre l’exécution de son éloignement en étant assigné à résidence, notamment pour :

Avoir connaissance de se trouver en situation irrégulière sur le territoire français tout en ayant la volonté de ne pas régulariser sa situation (paragraphes 1°,2°,3°)

Avoir refusé de communiquer les renseignements permettant d’établir son identité ou ses droits réels au séjour ou avoir menti sur son identité, être dépourvu de document d’identité ou de voyage, ou avoir tenté de se soustraire aux contrôles des autorités de police ou refusé de se soumettre aux relevés d’empreintes digitales ou de photographie, et ne pas disposer ‘d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale’ permettant de justifier d’une mesure d’assignation à résidence administrative (paragraphe 8°)

L’autorité préfectorale mesure l’ensemble de ces éléments pour apprécier le risque de soustraction à la décision d’éloignement.

A ce titre, il peut être légitimement être considérée par l’autorité préfectorale que l’existence d’une adresse pouvant être qualifiée de ‘résidence effective’ soit néanmoins insuffisante pour accorder à l’étranger une assignation à résidence, dés lors que d’autres éléments de fait permettent raisonnablement de considérer que l’étranger n’entend pas se conformer à l’obligation de quitter le territoire français.

Même si séparément chaque critère invoqué par l’appelant n’est pas suffisant en soi, pour motiver un placement en rétention administrative, la conjonction de l’ensemble des critères retenus a légitimement permis à l’autorité administrative de considérer que ce dernier ne disposait pas des garanties suffisantes pour être assigné à résidence.

En l’espèce, au jour où il a statué le préfet ne disposait pas des attestations d’hébergement et documents présentés à l’audience. A ce titre il importe de rappeler qu’il appartient à l’étranger, soumis aux règles de procédure civile, de démontrer l’existence d’une adresse stable et personnelle à laquelle il pourrait le cas échéant être assigné à résidence plutôt que de faire l’objet d’un placement en rétention administrative. S’il ne peut être reproché à l’étranger de ne pas être porteur des justificatifs de domicile sur lui lors du contrôle il échet de préciser que ce dernier disposait de la faculté de se faire apporter ou envoyer ces justificatifs en cours de retenue puisqu’il conserve dans le cadre de cette mesure un libre accès avec l’extérieur, ce qui n’a pas été fait en l’espèce.

L’absence de passeport en cours de validité ne permet pas d’écarter automatiquement une assignation en résidence administrative, cette seule circonstance ne caractérise pas pour autant l’erreur d’appréciation.

L’arrêté de placement en rétention administrative a en outre été pris en considération des déclarations de l’étranger qui a indiqué lors de son audition qu’il avait sa famille au Mali, qu’il avait un frère à [Localité 7] [U] [P], qu’il n’avait pas de titre de séjour, qu’il n’avait dans un premier temps pas donné sa véritable identité, qu’il avait un enfant de 2 ans qui vivait en France et se nommait [M] [U] née le 7 juillet 2020 et que la mère de son enfant [G] [H] habitait [Adresse 6] et qu’il lui adressait de l’argent tous les mois pour l’enfant, qu’il se déplaçait pour lui rendre visite, et vouloir rester sur le territoire français.

Il s’ajoute encore que l’appelant produit devant la cour divers documents à savoir l’acte de naissance de sa fille, une attestation d’hébergement chez [U] [D] demeurant à [Localité 5] sur seine, un document de virement d’une somme de 150 euros à [H] [G], il demeure que la tardiveté de ces révalations n’a pas permis à l’

autorité administrative d’effectuer les vérifications en temps utiles. Ainsi, dans tous les cas, aucune erreur d’appréciation quant à la situation de M. [U] ne saurait être retenue.

Il s’en suit qu’au jour où l’arrête de placement en rétention a été adopté, aucune erreur d’appréciation quant à la teneur des garanties de représentation et de domiciliation de l’appelant ne peut être retenue.

En conséquence la décision querellée comporte donc les motifs de droit et de fait qui en constituent le fondement et l’appelant a pu être regardé comme ne présentant pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu’il se soustraie à l’obligation de quitter le territoire, et/ou comme présentant un risque manifeste de fuite.

Sur l’absence d’examen réel de la possibilité de l’assigner à résidence

Aux termes des articles L 731-1 et L 731-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’autorité administrative peut prendre une décision d’assignation à résidence à l’égard de l’étranger pour lequel l’exécution de l’obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné à l’article L 612-2,3°, qu’il se soustraie à cette obligation.

Il s’en suit que le fait de justifier disposer ‘d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale’ conforme à l’article L.612-3,8°du CESEDA peut, au cas d’espèce, légitimement être considérée par l’autorité préfectorale comme néanmoins insuffisante pour accorder à l’étranger une assignation à résidence sur le fondement des articles précités, dés lors que d’autres éléments de fait permettent raisonnablement de considérer que l’étranger n’entend pas se conformer à l’obligation de quitter le territoire français.

L’erreur d’appréciation invoquée à l’encontre de l’arrêté de placement en rétention administrative quant aux garanties de représentation invoquées par l’étranger doit être jugée en fonction des éléments dont le préfet disposait au moment où la décision contestée a été arrêtée. 

En l’espèce, ce n’est que devant la cour que que l’appelant produit divers documents à savoir l’acte de naissance de sa fille, une attestation d’hébergement chez [U] [D] demeurant à [Localité 5] sur seine, un document de virement d’une somme de 150 euros à [H] [G], lors de son audition il n’a nullement donner d’adresse ni d’information sur un possible hébergement indiquant seulement qu’il rendait souvent visite à la mère de son enfant, sans pour autant indiqué qu’il était marié et vivait avec elle, il demeure que la tardiveté de ces révalations n’a pas permis à l’autorité administrative d’effectuer les vérifications en temps utiles et accordé une assignation à résidence.

Aucune erreur d’appréciation ne saurait dès lors être retenue en ce qui concerne les garanties de représentation et, pour les mêmes motifs, la décision ne paraît pas disproportionnée au regard du but recherché.

 

Le moyen est rejeté.

Sur le respect de la vie familiale et privée

Le contrôle du respect de l’article 8 de la CEDH, accordant à toute personne le droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, par le juge judiciaire ne doit s’entendre qu’au regard de l’arrêté préfectoral de placement en rétention contesté et non au regard du titre d’éloignement ou du choix du pays de retour, cirières de la compétence du juge administratif.

Au jour où l’arrêté de placement en rétention administrative a été adopté, l’appelant n’indiquait nullement vivre avec femme et enfant, seulement qu’il leur rendait visite il ne saurait donc sérieusement alléguer une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale par l’arrêté sur la seule base de documents afférents à la situation de M. [U] qu’il n’a déclaré que postérieurement audit arrêté, outre le fait que Le dit arrêté de placement en rétention a été adopté pour une durée de 48 heures

En conséquence et en l’espèce, l’autorité préfectorale n’a pas commis d’erreur d’appréciation en ordonnant le placement en rétention administrative de l’intéressé.

II- Sur les moyens tirés de la demande de prolongation du placement en rétention

Sur le moyen tiré de l’interprétariat

L’article L. 141-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose que :

Lorsque les dispositions du présent code prévoient qu’une information ou qu’une décision doit être communiquée à un étranger dans une langue qu’il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits dans cette langue, soit par l’intermédiaire d’un interprète. L’assistance de l’interprète est obligatoire si l’étranger ne parle pas le français et qu’il ne sait pas lire.

En cas de nécessité, l’assistance de l’interprète peut se faire par l’intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu’à un interprète inscrit sur une liste établie par le procureur de la République ou à un organisme d’interprétariat et de traduction agréé par l’administration. Le nom et les coordonnées de l’interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l’étranger.

Il ressort de la lecture de la procédure pénale que l’interprète en langue bambara M. [K] [Y] qui a assisté M. [U] lors de son audition le 27juillet à 16h45, était présent à ses cotés, et qu’il l’a fait par téléphone pour la notication de l’OQ’l`F et le placement en rétention le 28 juillet àl2h20. Son nom figure dans les actes de procédure. Si les motifs du recours à l’interprète par téléphone ne figurent pas dans les actes précités, l’appelant ne cite pas le texte prévoyant que cette mention est prescrite à peine de nullité ni n’établit de grief particulier subi. Il en va de même pour l’absence des coordonnées de l’interprète. En outre, il n’est pas établi que cette traduction par téléphone ait causé grief à l’intéressé dans la mesure où il a parfaitement compris le sens des décisions et les droits qu’il pouvait exercer en rétention.

Le moyen n’est donc pas fondé.

Sur les diligences de l’adminitration et la saisine des autorités maliennes

Il ressort de l’article L 741-3 du CESEDA que l’administration doit justifier avoir effectué toutes les ‘diligences utiles’ suffisantes pour réduire au maximum la période de rétention de l’étranger.

Il ressort de l’article L 751-9 du CESEDA qu’au cas spécifiques des étrangers faisant l’objet d’une demande de réadmission dans un pays de l’espace SCHENGHEN, l’étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à la détermination de l’Etat responsable de l’examen de sa demande d’asile et, le cas échéant, à l’exécution d’une décision de transfert. Lorsqu’un Etat requis a refusé de prendre en charge ou de reprendre en charge l’étranger, il est immédiatement mis fin à la rétention de ce dernier, sauf si une demande de réexamen est adressée à cet Etat dans les plus brefs délais ou si un autre Etat peut être requis. En cas d’accord d’un Etat requis, la décision de transfert est notifiée à l’étranger dans les plus brefs délais.

En l’espèce les services de la préfecture ont effectué une demande de routage et pris attache avec les autorités consulaires maliennes dont l’étranger revendique la nationalité pendant la période de rétention.

Les diligences ont été entreprises par les autorités françaises dés le 28 juillet 2022 ce qui constitue un délai raisonnable.

Le moyen tiré de l’absence de diligence sera donc rejeté.

Sur la consultation du fichier FAED et du fichier VISABIO

Selon l’article L. 142-2 du CESEDA, les données des traitements automatisés des empreintes digitales mis en ‘uvre par le ministère de l’intérieur peuvent être consultées par les agents expressément habilités des services de ce ministère dans les conditions prévues par le règlement (UE) 2016/679 du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données et par la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Au regard de l’ingérence dans le droit au respect de la vie privée que constituent, au sens de l’article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la conservation dans un fichier automatisé des empreintes digitales d’un individu identifié ou identifiable et la consultation de ces données, l’habilitation des agents est une garantie institutionnelle édictée pour la protection des libertés individuelles. S’il ne résulte pas des pièces du dossier que l’agent ayant consulté les fichiers d’empreintes était expressément habilité à cet effet, la procédure se trouve entachée d’une nullité d’ordre public, sans que l’étranger qui l’invoque ait à démontrer l’existence d’une atteinte portée à ses droits (1re Civ., 14 octobre 2020, pourvoi n° 19-19.234).

En l’espèce, il ne résulte pas de la procédure qu’une consulatation de ces deux fichiers ait été faites, seule une consultation des fichiers, de Traitement des Antécédents Judiciaires (TAJ), du Fichier des Personnes Recherchées (FPR), et du de Gestion des Dossiers des Ressortissants Étrangers en France (AGDREE), la consultation a été effectuée par le maréchal des logis chef SANTOS DEL PARAMO officier de police judiciaire, agent habilité, la consultation fait foi jusqu’à preuve du contraire qui n’est en l’espèce pas rapportée, alors par ailleurs que l’habilitation est démontrée par la possibilité même pour l’agent concerné d’avoir accès à ces fichiers puisque tous les accès individuels sont sécurisés par un mot de passe et un identifiant. Les agents non habilités ne peuvent donc pas avoir accès à ces informations faute d’avoir les codes nécessaires.

Le moyen est rejeté.

Sur l’irrégularité de la requête en prolongation de la mesure de rétention :

L’ article R. 743-2 du CESEDA prévoit ‘A peine d’irrecevabilité, la requête est motivée, datée et signée, selon le cas, par l’étranger ou son représentant ou par l’autorité administrative qui a ordonné le placement en rétention.

Lorsque la requête est formée par l’autorité administrative, elle est accompagnée de toutes pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L. 744-2.

Lorsque la requête est formée par l’étranger ou son représentant, la décision attaquée est produite par l’administration. Il en est de même, sur la demande du juge des libertés et de la détention, de la copie du registre.

Il en résulte que la requête de l’administration en prolongation de la mesure de rétention doit être motivée, signée, datée et accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles et nécessaires au juge de la liberté et de la détention pour prendre sa décision.

En l’espèce, la cour constate que toutes les picèces utiles nécessaires au juge de la liberté et de la détention ont été jointes avec la requête notamment la demande de laissez-passer, de routing, les procès-verbaux d’investigation, de réquisition d’interprère, de retenue, d’information du procureur de la république, d’audition, de consultation de fichiers, le titre d’éloignement, l’OQTF.

Dès lors la requête motivée en fait et en droit est régulière.

Le moyen est rejeté.

Sur la demande d’assignation à résidence judiciaire

L’article L.743-13 du CESEDA dispose que :

‘Le juge des libertés et de la détention peut ordonner l’assignation à résidence de l’étranger lorsque celui-ci dispose de garanties de représentation effectives.

L’assignation à résidence ne peut être ordonnée par le juge qu’après remise à un service de police ou à une unité de gendarmerie de l’original du passeport et de tout document justificatif de son identité, en échange d’un récépissé valant justification de l’identité et sur lequel est portée la mention de la décision d’éloignement en instance d’exécution.

Lorsque l’étranger s’est préalablement soustrait à l’exécution d’une décision mentionnée à l’article L. 700-1, à l’exception de son 4°, l’assignation à résidence fait l’objet d’une motivation spéciale.’

Le fait de justifier disposer ‘d’une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale’ conforme à l’article L.612-3,8° du CESEDA peut néanmoins, au cas d’espèce, légitimement être considéré par l’autorité judiciaire comme insuffisant pour accorder à l’étranger une assignation à résidence sur le fondement de l’article L.743-13 précité, dés lors que d’autres éléments de fait permettent raisonnablement de considérer que l’étranger n’entend pas se conformer à l’obligation de quitter le territoire français et qu’en conséquence la mesure d’assignation à résidence ne serait pas suffisamment coercitive pour assurer la bonne exécution de l’éloignement.

En l’espèce il apparaît que :

L’intéressé dispose :

D’un hébergement chez M. [D] [U] demeurant [Adresse 1],

D’attache familiales ou sentimentales en ce qu’il a une compagne Mme [G] [H] et une fille de 2 ans, avec lesquelles il ne vit pas.

Ces éléments permettent de considérer que l’intéressé dispose des garanties de représentation effectives suffisantes pour être assigné à résidence à l’adresse ci dessus mentionnée.

Si ces élements permettent de considérer que M. [U] a une résidence effective etablie, ses liens familiaux sont insuffisants pour lui accorder une assignation à résidence dès lors que M. [U]a déclaré lors de son audition souhaiter demeurer en France, permettent raisonnablement de considérer qu’il n’entend pas se conformer à l’obligation de quitter le territoire français.

La demande est rejetée.

Sur la notification de la décision à M. [E] [U]

En application de l’article R. 743-19 al 2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’ordonnance rendue par le premier président ou son délégué est communiquée au ministère public. Elle est notifiée sur place à l’étranger et à son conseil, s’il en a un, ainsi qu’à l’autorité qui a prononcé la rétention.

Les parties présentes en accusent réception. Le greffier la notifie par tout moyen et dans les meilleurs délais aux autres parties qui en accusent réception.

En l’absence de M. [E] [U] lors du prononcé de la décision, la présente ordonnance devra lui être notifiée par les soins du greffe du centre de rétention administrative et en tant que de besoin, par truchement d’un interprète.

PAR CES MOTIFS :

DÉCLARE l’appel recevable ;

CONFIRME l’ordonnance entreprise.

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [E] [U] par l’intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d’un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l’autorité administrative.

Pauline LEGROS, greffière

Danielle THEBAUD,

A l’attention du centre de rétention, le dimanche 31 juillet 2022

Bien vouloir procéder à la notification de l’ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l’interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [R] [C]

Le greffier

N° RG 22/01297 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UNP5

REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE 1308 DU 31 Juillet 2022 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l’intéressé au greffe de la cour d’appel de Douai par courriel – [Courriel 4]) :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Pour information :

L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le

– M. [E] [U]

– par truchement téléphonique d’un interprète en tant que de besoin

– nom de l’interprète (à renseigner) :

– décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [E] [U] le dimanche 31 juillet 2022

– décision transmise par courriel pour notification à MME LA PREFETE DE L’OISE et à Maître Zélie HENRIOT le dimanche 31 juillet 2022

– décision communiquée au tribunal administratif de Lille

– décision communiquée à M. le procureur général

– copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER

Le greffier, le dimanche 31 juillet 2022

N° RG 22/01297 – N° Portalis DBVT-V-B7G-UNP5

 

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