17 avril 2023
Cour d’appel de Nîmes
RG n°
23/00368

Ordonnance N°23/342

N° RG 23/00368 – N° Portalis DBVH-V-B7H-IY74

J.L.D. NIMES

14 avril 2023

[O]

C/

LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE

COUR D’APPEL DE NÎMES

Cabinet du Premier Président

Ordonnance du 17 AVRIL 2023

Nous, Madame Alexandra BERGER, Conseillère à la Cour d’Appel de NÎMES, conseiller désigné par le Premier Président de la Cour d’Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l’Asile (CESEDA), assisté de Mme Emmanuelle PRATX, Greffière,

Vu l’arrêté de M. Le Préfet des Bouches du Rhone portant obligation de quitter le territoire national en date du 11 avril 2023 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 11 avril 2023, notifiée le même jour à 18h00 concernant :

M. [Z] [O]

né le 08 Octobre 1972 à [Localité 5]

de nationalité Tunisienne

Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 13 avril 2023 à 14h16, enregistrée sous le N°RG 23/1859 présentée par M. le Préfet des Bouches du Rhone ;

Vu l’ordonnance rendue le 14 Avril 2023 à 16h00 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES, qui a :

* Rejeté les exceptions de nullité soulevées ;

* Ordonné pour une durée maximale de 28 jours commençant 48H après la notification de la décision de placement en rétention, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, de M. [Z] [O];

* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l’expiration d’un délai de 28 jours à compter du 13 avril 2023 à 18h00,

Vu l’appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [Z] [O] le 15 Avril 2023 à 12h06 ;

Vu l’absence du Ministère Public près la Cour d’appel de NIMES régulièrement avisé ;

Vu l’absence du Préfet des Bouches du Rhone, régulièrement convoqué,

Vu l’assistance de Monsieur [Y] [F] interprète en langue arabe inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel de Nîmes,

Vu la comparution de Monsieur [Z] [O], régulièrement convoqué ;

Vu la présence de Me Saphia FOUGHAR, avocat de Monsieur [Z] [O] qui a été entendu en sa plaidoirie ;

MOTIFS

Monsieur [Z] [O] a reçu notification le 11 avril 2023 d’un arrêté des Bouches du Rhône du même jour lui faisant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour pendant deux ans.

Monsieur [O] a fait l’objet d’un contrôle d’identité le 11 avril 2023, à 9h45, à [Localité 6].

Par arrêté de la même préfecture en date du 11 avril 2023 et qui lui a été notifié le jour même à 18h00, il a été placé en rétention administrative aux fins d’exécution de la mesure d’éloignement.

Par requêtes du 13 avril 2023, le Préfet des Bouches du Rhône a saisi le Juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nîmes d’une demande en prolongation de la mesure.

Par ordonnance prononcée le 14 avril 2023 à 16h00, le Juge des libertés et de la détention de Nîmes a rejeté les exceptions de nullité soulevées ainsi que les moyens présentés par Monsieur [Z] [O] et ordonné la prolongation de sa rétention administrative pour vingt-huit jours.

Monsieur [Z] [O] a interjeté appel de cette ordonnance le 15 avril 2023, à 12h06.

Sur l’audience, Monsieur [Z] [O] déclare :

– il est en France depuis de nombreuses années et n’a pas fait de démarches pour régulariser sa situation, son ex-compagne ayant conservé son passeport, et n’ayant pas tous les documents nécessaires à sa disposition,

– il doit passer devant le TA cette après-midi pour faire annuler la décision portant obligation de quitter le territoire national,

– il explique vivre dans la précarité du fait de l’absence de justificatif d’identité, notamment pour louer un logement, pour travailler,

– c’est la première fois qu’il se fait contrôler quant à sa situation administrative.

Son avocate soutient :

– l’irrégularité de la notification des droits, car le délai de route jusqu’au commissariat, trois km plus loin est très court et n’explique pas la notification tardive ; à 10h, le parquet de Paris a été interrogé par rapport à une plainte de son ex-compagne, et à 10h30, les droits de GAV ont été notifiées, soit 45 min de battement entre l’interpellation et la notification de la GAV, et la C.CASS considère que trente min c’est déjà un délai tardif, donc il n’y a aucune circonstance insurmontable car le motif de l’interpellation c’est l’absence de titre de séjours,

– l’avis tardif au parquet, par la suite, à 10h40, vicie la procédure,

– se désiste du moyen tiré de l’irrégularité de la requête en prolongation de la mesure.

Monsieur le Préfet des Bouches du Rhône n’est pas représenté.

SUR LA RECEVABILITE DE L’APPEL :

L’appel interjeté par Monsieur [Z] [O] à l’encontre d’une ordonnance du Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Nîmes prononcée en sa présence a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L.743-21, R.743-10 et R.743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Il est donc recevable.

SUR LES MOYENS NOUVEAUX ET ÉLÉMENTS NOUVEAUX INVOQUÉS EN CAUSE D’APPEL:

L’article 563 du code de procédure civile dispose : «  Pour justifier en appel les prétentions qu’elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »

L’article 565 du même code précise : «  Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ».

Sauf s’ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l’article 74 du code de procédure civile, les moyens nouveaux sont donc recevables en cause d’appel.

A l’inverse, pour être recevables en appel, les exceptions de nullité relatives aux contrôle d’identité, conditions de la garde à vue ou de la retenue et d’une manière générale celles tenant à la procédure précédant immédiatement le placement en rétention doivent avoir été soulevées in « limine litis » en première instance.

Par ailleurs, le contentieux de la contestation de la régularité du placement en rétention (erreur manifeste d’appréciation de administration ou défaut de motivation) ne peut être porté devant la cour d’appel que s’il a fait l’objet d’une requête écrite au juge des libertés et de la détention dans les 48 heures du placement en rétention, sauf à vider de leur sens les dispositions légales de l’article R.741.3 du CESEDA imposant un délai strict de 48h et une requête écrite au Juge des libertés et de la détention.

En l’espèce, Monsieur [Z] [O] soulève des moyens de nullité soulevé in limine litis devant le juge de première instance . Ces moyens sont recevables.

SUR LES EXCEPTIONS DE NULLITÉ AU TITRE D’IRRÉGULARITÉS DE LA PROCÉDURE ANTÉRIEURE A L’ARRÊTÉ :

L’article L.743-12 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose: « En cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation des formalités substantielles, le juge des libertés et de la détention saisi d’une demande sur ce motif ou qui relève d’office une telle irrégularité ne peut prononcer la mainlevée de la mesure de placement en rétention que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger »

Ainsi une irrégularité tirée de la violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d’inobservation de formalités substantielles ne peut conduire à une mainlevée de la rétention que si elle a eu pour effet de porter atteinte aux droits de l’étranger.

Sur la notification des droits et l’avis à Parquet :

Il ressort de la procédure, les éléments suivants :

– Monsieur [Z] [O] a été contrôlé à 9h45, [Adresse 2], à [Localité 6], dans le premier arrondissement,

– les fonctionnaires de police, lors du contrôle de Monsieur [Z] [O] constatent que celui-ci fait l’objet d’une fiche de recherche active après consultation du fichier des personnes recherchées, que dès lors, agissant dans le cadre de cette fiche de recherche, ils décident de procéder à l’interpellation de l’intéressé à 9h45, et se déplacent au service, [Adresse 1], pour présentation à l’officier de police judiciaire,

– le 11 avril, à 10h00, les fonctionnaires de police sollicitent le procureur de la République de Créteil qui leur indique que la fiche de recherche est toujours active, pour des faits de violences conjugales et que Monsieur [Z] [O] doit être placé en garde à vue,

– le 11 avril, à 10h15, les services de police de [Localité 6] prennent attache avec ceux de [Localité 8] pour les informer du placement en garde à vue de Monsieur [Z] [O] et leur demander la transmission du fond du dossier ayant donné lieu à édition d’une fiche de recherche,

– le 11 avril, à 10h30, l’officier de police judiciaire notifie les droits de la mesure de garde à vue à Monsieur [Z] [O]

– le 11 avril, à 10h40, le Procureur de la République de Créteil est avisé du placement en garde à vue de Monsieur [Z] [O], mesure prenant effet depuis 9h45.

Il ressort de ce qui précède que l’interpellation de Monsieur [Z] [O] est bien fondé sur la fiche de recherche dont il fait l’objet pour des violences conjugales qu’on lui reproche d’avoir commises sur le ressort de [Localité 4]. Dès, lors, au délai de route pris par les fonctionnaires de police pour acheminer Monsieur [Z] [O] au service et le présenter à un officier de police judiciaire, dans un délai de route approximatif de dix minutes, s’ajoutent les vérifications entreprises auprès du Procureur de la République de Créteil, à 10h00 et celles faites auprès des fonctionnaires de police de [Localité 8] aux fins de transmission de la procédure. Il y a donc lieu de considérer que la notification des droits n’est pas tardive eu égard aux différentes vérifications réalisées par les services de police préalablement au placement en garde à vue de Monsieur [Z] [O]. Il s’ensuit que l’avis au Procureur de la République, à 10h40, soit dix minute après le placement en garde à vue de Monsieur [Z] [O] n’est pas excessif, étant constaté au demeurant que celui-ci avait donné instruction de ce placement à 10h00.

La procédure étant régulière, il y a lieu de rejeter les moyens soulevés.

SUR LE FOND :

L’article L.611-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile dispose des cas dans lesquels un étranger peut faire l’objet d’une obligation de quitter le territoire français et/ou l’article L.612-6 du même code d’une interdiction de retour sur le territoire français tandis que l’article L611-3 du même code liste de manière limitative les situations dans lesquelles de telles mesures sont exclues.

L’article L.741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile précise qu’en tout état de cause «un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet.»

En l’espèce, l’administration a saisi les autorités tunisiennes le 12 avril 2023.

Il s’en déduit qu’il y a lieu de dire et juger que l’administration n’ a pas failli à ses obligations.

SUR LA SITUATION PERSONNELLE DE MONSIEUR [Z] [O] :

Monsieur [Z] [O], présent irrégulièrement en France est dépourvu de passeport et de pièces administratives pouvant justifier de son identité et de son origine de telle sorte qu’une assignation à résidence judiciaire est en tout état de cause exclue par les dispositions de l’article L743-13 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Au demeurant, le retenu n’a fait aucune démarche de régularisation alors qu’il semble, à ses dires, qu’il soit présent depuis de nombreuses année sur le territoire français. Il indique lui-même vivre dans une grande précaritéet ne pouvoir présenter de garanties de représentation.

Monsieur [Z] [O] est l’objet d’une mesure d’éloignement en vigueur, telle que précitée, et qui fait obstacle à sa présence sur le sol français.

Il s’en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu’il puisse être procédé effectivement à son éloignement.

Il convient par voie de conséquence de confirmer l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,

Vu l’article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,

Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9 ; R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile,

DÉCLARONS recevable l’appel interjeté par Monsieur [Z] [O] ;

CONFIRMONS l’ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

RAPPELONS que, conformément à l’article R.743-20 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 3].

Fait à la Cour d’Appel de NÎMES,

le 17 Avril 2023 à

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

‘ Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 7] à M. [Z] [O].

Le à H

Signature du retenu

Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :

– Monsieur [Z] [O], par le Directeur du centre de rétention de [Localité 7],

– Me Saphia FOUGHAR, avocat

(de permanence),

– M. Le Préfet des Bouches du Rhone

,

– M. Le Directeur du CRA de [Localité 7],

– Le Ministère Public près la Cour d’Appel de NIMES

– Mme/M. Le Juge des libertés et de la détention,

 

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