21 juin 2023
Cour d’appel de Toulouse
RG n°
23/00669

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

Minute 2023/672

N° RG 23/00669 – N° Portalis DBVI-V-B7H-PQUO

O R D O N N A N C E

L’an DEUX MILLE VINGT TROIS et le 21 JUIN 2023 A 14H35

Nous P. ROMANELLO, magistrat délégué par ordonnance du Premier Président en date du 7 DECEMBRE 2022 pour connaître des recours prévus par les articles L. 743-21 et L.342-12, R.743-10 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Vu l’ordonnance rendue le 18 Juin 2023 à 18H12 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Toulouse ordonnant la prolongation du maintien au centre de rétention de :

X se disant [U] [Z]

né le 18 Mars 1989 à [Localité 2] (LYBIE)

de nationalité Libyenne

Vu l’appel formé le 19/06/2023 à 17 h 25 par courriel, par Me Léa COHEN, avocat au barreau de TOULOUSE;

A l’audience publique du 20 JUIN 2023 A 15H30, assisté de P.GORDON, adjoint administratif faisant fonction de greffier, avons entendu :

X se disant [U] [Z]

assisté de Me Léa COHEN, avocat au barreau de TOULOUSE

qui a eu la parole en dernier ;

avec le concours de [J] [E], interprète, qui a prêté serment,

En l’absence du représentant du Ministère public, régulièrement avisé;

En présence de Monsieur [R], représentant la PREFECTURE DE L’HERAULT ;

avons rendu l’ordonnance suivante :

Exposé des faits

Vu les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile et les dispositions du CESEDA,

Vu l’arrêté de Monsieur le préfet de l’Hérault en date du 22 septembre 2022 régulièrement notifié, portant obligation à Monsieur [U] [Z] de quitter le territoire sans délai, avec interdiction de retour pendant un délai de 3 ans ;

Vu la procédure pénale initiée le 15 juin 2023 à l’encontre de Monsieur [U] [Z] pour des faits de détention de stupéfiants,

Vu l’arrêté de Monsieur le préfet de l’HERAULT du 16 juin 2023, décidant le placement en rétention administrative de Monsieur [U] [Z] ;

Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Toulouse en date du 18 juin 2023 à 18h12, prononçant la jonction de la requête en contestation du placement en rétention et de la requête en prolongation de rétention administrative et ordonnant la prolongation de la rétention pour une durée de 28 jours.

Vu l’appel interjeté par Monsieur [U] [Z] accompagné d’un mémoire, reçu le 19 juin 2023 à 17h25 ;

Vu le mémoire déposé par Monsieur [U] [Z] qui demande à la cour d’infirmer cette ordonnance aux motifs suivants :

La procédure préalable au placement en rétention administrative est irrégulière car il n’est pas justifié de l’habilitation pour consultation des fichiers FPR ;

la requête est irrecevable pour absence de motivation et de pièces utiles ;

la décision de placement en rétention est illégale car mal motivée, entachée d’une erreur de droit et d’une erreur manifeste d’appréciation.

Vu les débats lors de l’audience du 20 juin 2023 à 15h30, au cours desquels le conseil de Monsieur [U] [Z] a repris ses arguments ;

Ouï le préfet qui a sollicité confirmation de l’ordonnance entreprise ;

Ouï les observations de Monsieur [U] [Z] ;

SUR CE :

Sur la recevabilité de l’appel

A peine d’irrecevabilité, la déclaration d’appel doit être motivée, transmise par tout moyen au greffe de la cour d’appel.

L’ordonnance du juge des libertés et de la détention est susceptible d’appel dans les 24 heures de son prononcé ou si l’étranger n’a pas assisté à l’audience, de la notification de la décision qui lui a été faite.

En l’espèce, l’appel est recevable pour avoir été fait dans les termes et délais légaux.

Sur le contrôle de la procédure préalable à la rétention administrative

Pour être recevable, le moyen tiré d’une irrégularité affectant la procédure préalable à la rétention administrative doit concerner la procédure qui précède immédiatement le placement en rétention et être soulevé in limine litis. Les exceptions prises de la violation des dispositions liées à la procédure préalable au placement en rétention sont considérées comme des exceptions de procédure et doivent, en vertu de l’article 74, alinéa 1er, du code de procédure civile, être soulevées, à peine d’irrecevabilité, avant toute défense au fond.

Le conseil de Monsieur [U] [Z] expose que l’agent rédacteur du procès-verbal d’interpellation ne précise ni l’identité du personnel qui a consulté le fichier des personnes recherchées ni l’existence d’une habilitation pour y procéder.

L’article 15-5 du code de procédure pénale dispose que seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d’une enquête ou d’une instruction.

La réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d’une personne intéressée. L’absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n’emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure.

Au cas d’espèce, il ressort des éléments de la procédure que le 15 juin 2023 à 20h15, le brigadier [Y] [P] a procédé à l’interpellation de Monsieur [U] [Z] en flagrant délit de détention de produits stupéfiants. Il était assisté du brigadier-chef [B], du brigadier [M] et du brigadier [N]. Il précise « interrogeons le fichier des personnes recherchées ».

La cour relève que l’utilisation de la première personne du pluriel par le rédacteur du procès-verbal de police, n’engage pas obligatoirement action de plusieurs personnes mais reflète plutôt l’usage d’une figure de style des rédactions de police.

Quand bien même s’agirait-il de la première personne du pluriel, le consultant du FPR est forcément un de ces quatre brigadiers qui étaient présents sur place au moment de l’interpellation.

Dès lors que les brigadiers sont nommés et identifiés, par application de l’article susvisé, ils sont présumés être habilités à la consultation du fichier des personnes recherchées. Il appartient à Monsieur [U] [Z] d’apporter la preuve soit que ce ne serait pas le cas soit qu’il aurait souffert d’un grief.

Il n’apporte aucun élément à cet égard.

La procédure sera donc déclarée régulière comme proposé par le premier juge.

Sur l’irrecevabilité de la requête préfectorale

Aux termes des dispositions de l’article R 743-2 du CESEDA, la requête doit être accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles. A l’exception de la copie du registre de rétention prévu à l’article L.744-2 du CESEDA, les textes ne précisent pas les pièces justificatives utiles qui doivent accompagner la requête. Il s’agit en réalité des pièces nécessaires à l’appréciation par le juge des libertés et de la détention des éléments de fait et de droit dont l’examen lui permet d’exercer pleinement ses pouvoirs.

Le conseil de Monsieur [U] [Z] soutient que la requête serait irrecevable par ce que ne sont pas versés au dossier les documents afférents à la précédente rétention administrative de Monsieur [U] [Z] en 2022.

Néanmoins, l’arrêté préfectoral du 16 juin 2023 portant placement en rétention rappelle que Monsieur [U] [Z] a fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire le 22 septembre 2022, qu’il est démuni de tout document d’identité et de voyage valides et qu’il déclare être domicilié à [Localité 1] sans précision, qu’il n’envisage pas de quitter la France, qu’il n’a pas de garanties de représentation.

C’est donc au regard de cette situation précise que le juge des libertés et de la détention devait se prononcer et les ordonnances prises il y a plusieurs mois lors d’une précédente rétention ne sont pas en l’espèce utiles pour apprécier situation de Monsieur [U] [Z].

Le moyen d’irrecevabilité sera donc écarté.

Sur le contrôle de la phase de rétention administrative

Le contrôle de la décision initiale de placement en rétention doit permettre de constater la réalité de la motivation en droit et en fait de la décision L’article L. 741-6 exige une décision écrite et motivée. A ce stade, le contrôle ne porte pas sur la pertinence de la motivation, mais simplement sur son existence. La décision de placement en rétention administrative doit être écrite et motivée. Pour satisfaire à l’exigence de motivation, la décision doit comporter l’énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision.

Pour rappel, le préfet n’est pas tenu de faire état dans sa décision de tous les éléments de la situation personnelle de l’étranger dès lors que les motifs qu’il retient suffisent à justifier le placement en rétention au regard des critères légaux.

Le conseil de Monsieur [U] [Z] soutient que la décision de placement en rétention du 16 juin 2023 est lapidaire et donc insuffisamment motivée.

Toutefois, la requête préfectorale précise dans quelles conditions Monsieur [U] [Z] a été interpellé, flagrant délit de détention de stupéfiants, qu’il ne dispose pas de garanties de représentation effective, qu’il est démuni de tout document d’identité.

Autant d’éléments qui suffisent à exposer brièvement mais sincèrement la situation de Monsieur [U] [Z].

D’où il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Le conseil de Monsieur [U] [Z] soutient encore qu’il existait des mesures plus adaptées et que la rétention qui apparaît comme manifestement disproportionnée.

Néanmoins, le préfet a particulièrement souligné l’attitude de Monsieur [U] [Z] qui a clairement affirmé qu’il ne quitterait pas la France. En outre, il a été rappelé que dépourvu de pièces d’identité, l’intéressé n’avait ni ressources licites ni domicile en France.

D’où il s’ensuit que la préfecture n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation car la rétention constitue en l’espèce le seul moyen permettant d’envisager l’exécution de la mesure d’éloignement.

En conséquence, la décision déférée sera confirmée en toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance mise à disposition au greffe après avis aux parties,

Déclarons recevable l’appel interjeté par Monsieur [U] [Z] à l’encontre de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention de Toulouse en date du 18 juin 2023,

Confirmons ladite ordonnance en toutes ses dispositions,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée à la préfecture de l’Hérault, ainsi qu’au conseil de M. X se disant [U] [Z] et communiquée au ministère public.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE

P.GORDON Ph. ROMANELLO conseiller .

 

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