24 août 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
23/01458

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 23/01458 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCGT

N° de Minute : 1467

Ordonnance du jeudi 24 août 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [F] [B] [H]

né le 01 Janvier 1992 à [Localité 1] – GUINÉE

de nationalité Guinéenne

Actuellement retenu au cetre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne

assisté de Me Dalila BEN DERRADJI, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d’office

INTIMÉ

M. LE PREFET DU NORD

dûment avisé, absent non représenté

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d’appel de Douai : non comparant

MAGISTRAT(E) DELEGUE (E) : Bertrand DUEZ, conseiller à la cour d’appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière

DÉBATS : à l’audience publique du jeudi 24 août 2023 à 13 h 30

ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le jeudi 24 août 2023 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;

Vu l’ordonnance rendue le 22 août 2023 par le Juge des libertés et de la détention de LILLE prolongeant la rétention administrative de M. [F] [B] [H] ;

Vu l’appel interjeté par Maître [W] venant au soutien des intérêts de M. [F] [B] [H] par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 22 août 2023sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative  ;

Vu l’audition des parties, les moyens de la déclaration d’appel et les débats de l’audience ;

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 18 août 2023 à 09h05 les services de police intervenaient [Adresse 3] (59) pour un différent entre deux individus suivi de dégradations.

C’est dans ce cadre que monsieur [B] [H], de nationalité guinéenne a été interpellé, placé en garde à vue et par la suite a fait l’objet d’un placement en rétention administrative ordonné par monsieur le Préfet du Nord le 19 août 2023 à 17h30 pour l’exécution d’un éloignement vers la pays de nationalité au titre d’une mesure d’obligation de quitter le territoire français sans délai de retour volontaire délivrée le même jour par la même autorité.

Aucun recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative n’a été déposé au visa de l’article L 741-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

‘ Vu l’article 455 du code de procédure civile

‘ Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Lille en date du 22 août 2023 (15h06) ,ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l’appelant pour une durée de 28 jours.

‘ Vu la déclaration d’appel du 22.08.2023 à 16h01 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative en reprenant l’exception de procédure soulevée devant le juge des libertés et de la détention.

Au soutien de sa déclaration d’appel la conseil de monsieur [B] [H] expose le moyen suivant :

Irrégularité de la consultation du fichier des personnes recherchées (F.P.R) lors de l’interpellation faute d’identification de l’agent ayant procédé à cette investigation et faute de justification de l’habilitation de l’agent ayant procédé à cette consultation.

Le conseil de monsieur [B] [H] indique que cette omission sur le procès-verbal de saisine cause grief à monsieur [B] [H] en ce qu’elle a permis la visualisation de renseignement relatif à la mesure d’éloignement. Il est également plaidé que la présomption retenue par l’article 15-5 du code de procédure pénale n’exclut pas la justification de la désignation de l’agent consultant le Fichier des Personnes Recherchées ainsi que la preuve de son habilitation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur le moyen tiré de l’absence de désignation et d’habilitation de l’agent ayant consulté le Fichier des Personnes Recherchées

Il ressort de l’article 15-5 du code de procédure pénale applicable depuis le 23 janvier 2023 que:

‘Seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d’une enquête ou d’une instruction.

La réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d’une personne intéressée. L’absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n’emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure.’

Il se déduit de cet article applicable dans le cadre d’un contrôle d’identité ou d’une procédure pénale :

que le fonctionnaire de police consultant le Fichier des Personnes Recherchées soit précisément identifié et habilité pour ce faire,

que l’habilitation est présumée et que l’absence de mention de cette habilitation n’est pas de nature à entraîner la nullité du procès-verbal de consultation,

que le magistrat ou toute partie intéressée peut être amenée à exiger, sur demande spécifique, la justification de cette habilitation

Il appert de ces éléments que si la mention expresse d’une habilitation n’est pas de nature à entraîner la nullité du procès-verbal, la désignation du fonctionnaire de police qui procède à cette mesure doit cependant être portée au procès-verbal ne serais-ce que pour permettre le contrôle a posteriori du magistrat en charge de la procédure.

En l’espèce le procès-verbal de saisine indique en page 2/2 que monsieur [B] [H] a été ‘passé au Fichier des Personnes Recherchées’

Ce procès-verbal est rédigé par le gardien de la paix [G] [T] et mentionne que l’intervention policière a été effectuée par lui-même assisté du B/C [Z] et des Gpx [I] et [L].

Ainsi quatre policiers sont intervenus sur zone sans qu’il soit possible d’identifier lequel de ces quatre fonctionnaires de police a procédé à la consultation du Fichier des Personnes Recherchées concernant la situation de l’interpellé : monsieur [B] [H].

Il s’en suit qu’a défaut, pour le procès-verbal de saisine, d’individualiser le ou les policiers ayant procédé à la consultation du Fichier des Personnes Recherchées, aucun magistrat du parquet ou du siège n’est en mesure de requérir de fait, la justification de l’habilitation du fonctionnaire ayant effectué cette mesure comme la Loi le lui permet.

Les termes de l’article 15-5 du code de procédure pénale ne sont donc pas respectés, entraînant un grief évident en l’espèce puisque le contrôle de la régularité de la mesure ne peut, de fait, pas être effectué.

En conséquence le procès-verbal de saisine sera déclaré nul et entraînera l’annulation des actes subséquents en ce compris le placement en rétention administrative de monsieur [B] [H].

La décision déférée sera infirmée.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE l’appel recevable ;

INFIRME l’ordonnance entreprise.

Statuant de nouveau

ORDONNE la main-levée du placement en rétention administrative de monsieur [B] [H].

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l’appelant, à son conseil et à l’autorité administrative ;

LAISSE les dépens à la charge de l’Etat.

Véronique THÉRY,

greffière

Bertrand DUEZ,

conseiller

N° RG 23/01458 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCGT

REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE 1467 DU 24 Août 2023 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Pour information :

L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le jeudi 24 août 2023 :

– M. [F] [B] [H]

– l’interprète

– l’avocat de M. [F] [B] [H]

– l’avocat de M. LE PREFET DU NORD

– décision notifiée à M. [F] [B] [H] le jeudi 24 août 2023

– décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DU NORD et à Maître Dalila BEN DERRADJI le jeudi 24 août 2023

– décision communiquée au tribunal administratif de Lille

– décision communiquée à M. le procureur général :

– copie à l’escorte, au Juge des libertés et de la détention de LILLE

Le greffier, le jeudi 24 août 2023

N° RG 23/01458 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCGT

 

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