27 août 2023
Cour d’appel de Douai
RG n°
23/01480

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 23/01480 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCKG

N° de Minute : 1486

Ordonnance du dimanche 27 août 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. LE PREFET DU NORD

dûment avisé, absent non représenté,

INTIMÉ

M. [L] [N]

né le 7 Novembre 1987 à [Localité 5] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Ayant été retenu au centre de rétention de [Localité 1]

absent, non représenté

Ayant pour conseil Maître LAID, avocat au barreau de Lille,

PARTIE JOINTE

M. le procureur général : non comparant

MAGISTRATE DELEGUEE : Sylvie KARAS, Présidente de Chambre à la cour d’appel de Douai désignée par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assistée de Julie KALUZNY, Greffière

DÉBATS : à l’audience publique du dimanche 27 août 2023 à 13 h 00

ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai le dimanche 27 août 2023 à

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et spécialemnt L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l’ordonnance rendue le 24 août 2023 par le Juge des libertés et de la détention de LILLE qui a mis fin à la rétention administrative de de M. [L] [N] ;

Vu l’appel motivé interjeté par M. LE PREFET DU NORD par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 25 août 2023 ;

Vu l’audition des parties ;

EXPOSE DU LITIGE

Le 21 août 2023 à 12h05 les services de police du commissariat de [Localité 3] intervenaient gare [4] aux fins de procéder au contrôle d’identité de deux personnes de sexe masculin, ceci dans le cadre d’une note de service 1283/2023 ayant pour objet des opérations ponctuelles de prévention et de recherche des infractions liées à la criminalité tranfrontière.

C’est dans ce cadre que [L] [N] de nationalité algérienne a été interpellé et placé en garde à vue et par la suite a fait l’objet d’un placement en rétention administrative ordonné par Monsieur le Préfet du Nord le 22 août 2023 notifié le même jour à 12 heures aux fins de prise en charge par les autorités néerlandaises et allemandes formées en exécution du règlement n°604/2013 du conseil du 26 juin 2013.

‘ Vu l’article 455 du code de procédure civile

‘ Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Lille en date du 24 août 2023 (18h37), disant n’y avoir lieu à la prolongation du placement en rétention administrative de [L] [N] pour une durée de 28 jours,

‘ Vu la déclaration d’appel du préfet en date du 25 août 2023 à 16h10 sollicitant l’infirmation de l’ordonnance entreprise et par voie de conséquence la prolongation de la rétention de [L] [N] dans les locaux ne relvant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 28 jours à compter du 24 août 2023.

Au soutien de sa déclaration d’appel, le préfet excipe des dispositions de l’article 15-5 du code de procédure pénale modifié par la loi du 24 janvier 2023, soulignant que l’absence de mention expresse d’habilitation de l’agent ayant consulté le FPR n’entraine pas l’irrégularité de la procédure sur le motif de nullité d’ordre public.

Il argue en outre du fait qu’il n’est pas démontré par le juge des libertés et de la détention que la dite irrégularité fait grief aux droits de l’intéressé au sens de l’article L743-12 du CESEDA.

Il conclut dès lors qu’il a été procédé de manière régulière au placement en rétention administrative de [L] [N].

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le moyen tiré de l’absence de désignation et d’habilitation de l’agent ayant consulté le Fichier des Personnes Recherchées (FPR) :

Il ressort de l’article 15-5 du code de procédure pénale applicable depuis le 23 janvier 2023 que :

‘Seuls les personnels spécialement et individuellement habilités à cet effet peuvent procéder à la consultation de traitements au cours d’une enquête ou d’une instruction.

La réalité de cette habilitation spéciale et individuelle peut être contrôlée à tout moment par un magistrat, à son initiative ou à la demande d’une personne intéressée. L’absence de la mention de cette habilitation sur les différentes pièces de procédure résultant de la consultation de ces traitements n’emporte pas, par elle-même, nullité de la procédure.’

Il se déduit de cet article applicable dans le cadre d’un contrôle d’identité ou d’une procédure pénale :

que le fonctionnaire de police consultant le Fichier des Personnes Recherchées soit précisément identifié et habilité pour ce faire,

que l’habilitation est présumée et que l’absence de mention de cette habilitation n’est pas de nature à entraîner la nullité du procès-verbal de consultation,

que le magistrat ou toute partie intéressée peut être amenée à exiger, sur demande spécifique, la justification de cette habilitation

Il appert de ces éléments que si la mention expresse d’une habilitation n’est pas de nature à entraîner la nullité du procès-verbal, la désignation du fonctionnaire de police qui procède à cette mesure doit cependant être portée au procès-verbal ne serait-ce que pour permettre le contrôle a posteriori du magistrat en charge de la procédure.

En l’espèce le procès-verbal de saisine indique en page 2/2 de la procédure numérotée 2023/3992 du commissariat de [Localité 3] que ‘passés au fichier des personnes, il appert que les intéressés ne font l’objet d’aucune fiche de recherche quant à présent’ .

Ledit procès-verbal est rédigé par le sous-brigadier chef [K] [B], lequel fait état de l’assistance lors de l’intervention policière de la présence du brigadier major [E] et du sous-brigadier [Y].

Ainsi, trois policiers sont intervenus sur zone sans qu’il soit possible d’identifier lequel de ces trois fonctionnaires de police a procédé à la consultation du Fichier des Personnes Recherchées concernant la situation des interpellés et de notamment [L] [N].

Il s’en suit qu’a défaut, pour le procès-verbal de saisine, d’individualiser le ou les policiers ayant procédé à la consultation du Fichier des Personnes Recherchées, aucun magistrat du parquet ou du siège n’est en mesure de requérir de fait, la justification de l’habilitation du fonctionnaire ayant effectué cette mesure comme la Loi le lui permet.

Les termes de l’article 15-5 du code de procédure pénale ne sont donc pas respectés, entraînant un grief évident en l’espèce puisque le contrôle de la régularité de la mesure ne peut, de fait, pas être effectué.

En conséquence le procès-verbal de saisine ne peut qu’être déclaré nul, entraînant par voie de conséquence l’annulation des actes subséquents en ce compris le placement en rétention administrative de [L] [N].

La décision déférée sera dès lors confirmée.

PAR CES MOTIFS

DÉCLARE l’appel recevable,

CONFIRME l’ordonnance querellée,

DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [L] [N], à son conseil le cas échéant et à l’autorité administrative.

Julie KALUZNY, Greffière

Sylvie KARAS, Présidente de Chambre

N° RG 23/01480 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCKG

REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE DU 27 Août 2023 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l’intéressé au greffe de la cour d’appel de Douai par courriel – [Courriel 2]) :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Pour information :

L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

– décisision transmise par courriel pour notification à l’autorité administrative

– décision communiquée au tribunal administratif de Lille

– décision communiquée à M. le procureur général

– copie au Juge des libertés et de la détention de LILLE

Le greffier, le dimanche 27 août 2023

N° RG 23/01480 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCKG

 

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