Dès lors que l’employeur justifie que la vidéo-surveillance de l’établissement a été portée à la connaissance du salarié, produisant la lettre d’information sur la vidéo protection, les déclarations à la CNIL et la remise du règlement intérieur signée par le salarié, les image attestant du vol du salarié sont recevables.  

Preuve de la faute du salarié 

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué. 

 

Notion de faute grave

 
La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis ; la charge de la preuve incombe à l’employeur qui l’invoque. 

 

Dissimulation d’argent liquide par le salarié 

La lettre de licenciement reproche à Monsieur [S] un non-respect des procédures de caisses et la manipulation des caisses générant une mauvaise comptabilité et la dissimulation d’argent liquide, notamment des billets de 50 euros, engendrant une perte financière pour l’entreprise’;

La société Sig’Rest produit aux débats à la fois un constat d’huissier de justice exploitant la vidéo-surveillance de l’établissement, les plaintes déposées par la société et constats dressés par les services de police ainsi que deux attestations de salariés’;

Elle justifie par ailleurs que la vidéo-surveillance de l’établissement’avait été portée à la connaissance du salarié, produisant la lettre d’information sur la vidéo protection, les déclarations à la CNIL et la remise du règlement intérieur signée par Monsieur [S] ;

Ainsi, notamment, Madame [L], atteste avoir «’constaté que Monsieur [S] [O] à plusieurs reprises ne rendait pas correctement la monnaie à de jeunes étrangers ado. (‘), a encaissé une sucette, des pâtes et une bouteille d’ Oasis sans les typer sur la caisse (…)’»’;

 

PV d’huissier recevable 

Dans son procès-verbal de constat du 21 février 2019 l’huissier de justice indique notamment, après avoir visionné les video-surveillance de l’établissement’:

« Je vois que la femme recompte et ne semble pas satisfaite. L’instant d’après Monsieur [S] sort un ticket de caisse et remet 10 euros », « lorsque la cliente récupère la monnaie, elle n’a pas l’air satisfaite et je vois Monsieur [S] ouvrir le tiroir-caisse, prendre la pièce et lui transmettre » , et’: « constatons que la cliente remet un billet de 50 euros. Le caissier remet à cette dernière un billet de 10 euros et jette le ticket. A 16h06, constatons que le caissier ouvre la caisse et qu’il manipule des billets de 50 euros. Constatons ensuite que ce dernier s’écarte de la caisse et se dirige dans l’angle mort de la caméra. A 16h09, constatons que le caissier comptabilise quinze billets de 20 euros qu’il envoie directement dans un tube qui part directement au coffre mais aucun billet de 50 euros »’;

Le décompte de caisses révèle que trois billets de 50 euros manquaient, alors que les relevés de ces caisses font état de 11 billets de 50 euros et qu’il ressort du constat d’huissier que l’intéressé avait reçu à son poste 15 billets de 50 euros et en avait rendu un seul’;

Indépendamment des espèces retrouvées sur la personne de Monsieur [S], que celui-ci a accepté de remettre lorsqu’il lui a été demandé de vider ses poches, la preuve du manque d’argent liquide en caisse découle des autres modes de preuve susvisés’;

Monsieur [S] affirme ensuite que l’argent manquant, qu’il détenait sur lui le 18 avril 2018 provenait d’un ‘pari heureux au courses’; s’il produit la copie d’un ticket de PMU mentionnant des gains de 1 371,90 euros, ce ticket est daté du 20 mars 2018 et, surtout, n’est pas nominatif’; le salarié procède encore par voie de simple affirmation, non corroborée d’autres éléments, lorsqu’il ajoute qu’il comptait alors faire changer les pneus neige de sa voiture’;

Les faits reprochés au salarié sont établis. S’ils ne rendent pas impossible son maintien dans l’entreprise, au regard de sa très grande ancienneté et de l’absence d’antécédent disciplinaire au cours des trois années précédant l’engagement de la procédure de licenciement, ils caractérisent néanmoins une faute constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement.

*      *      *

Cour d’appel de Versailles, 15e chambre, 9 mars 2023, 21/01119

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

15e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 09 MARS 2023

N° RG 21/01119 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UODJ

AFFAIRE :

[O] [S]

C/

S.A. SIG’REST (Société d’Investissement de Gestion et de Restauration)

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Mars 2021 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MONTMORENCY

N° Section : C

N° RG : F 18/00424

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Emily JUILLARD

Me Jérôme ARTZ de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [O] [S]

né le 15 Octobre 1967 à [Localité 5] (ALLEMAGNE)

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentant : Me Emily JUILLARD, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0858

APPELANT

****************

S.A. SIG’REST (Société d’Investissement de Gestion et de Restauration)

N° SIRET : 517 975 587

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Jérôme ARTZ de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0097, substitué par Me Laurène ROUSSET-ROUVIERE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND.

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 18 Janvier 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Thierry CABALE, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Greffier en pré-affectation lors des débats : Madame Juliette DUPONT,

Greffier lors du prononcé : Madame Sophie RIVIERE

Monsieur [S] a été embauché à compter du 24 septembre 1990 en qualité de pompiste-caissier par la SARL Duranton. Suite à des transferts de contrat de travail, Monsieur [S] occupait en dernier lieu le poste d’employé commercial au sein de la société Sig’Rest.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des chaines de cafétéria et assimilés.

Le salaire mensuel moyen de Monsieur [S] était de 1.688,79 euros.

Par courrier remis en mains propres le 18 avril 2018, Monsieur [S] était convoqué à un entretien préalable à un licenciement, et se voyait notifier sa mise à pied conservatoire, pour vol et irrégularités dans la gestion de la caisse.

Par courrier du 4 mai 2018, la société Sig’Rest notifiait à Monsieur [S] son licenciement pour faute grave.

Par requête reçue au greffe le 28 juin 2018, Monsieur [S] a saisi le conseil des Prud’hommes de Montmorency afin de contester la légitimité de son licenciement et d’obtenir le versement de diverses sommes.

Par jugement du 15 mars 2021, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil des prud’hommes de Montmorency a’:

– Dit n’y avoir lieu à sursis à statuer,

– Dit que le licenciement de [O] [S] est fondé sur un motif réel et sérieux, constitutif d’une faute grave,

– Débouté [O] [S] de l’intégralité de ses demandes,

– Débouté la SA Sig’Rest de ses demandes reconventionnelles,

– Mis les dépens à la charge de [O] [S].

Par déclaration au greffe du 13 avril 2021, Monsieur [S] interjetait appel du jugement rendu le 11 février 2021.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 13 avril 2021 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, Monsieur [O] [S], appelant, demande à la cour de’:

– Déclarer recevable et fondé l’appel interjeté par’ Monsieur'[O] [S].

Y faisant droit,

– Infirmer la décision entreprise et, statuant à nouveau :

-‘ Dire et juger que le licenciement pour faute grave de Monsieur [S] du 18 mai 2018 est à titre principal entaché de nullité ou à titre subsidiaire dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

-‘ Fixer le salaire de référence de Monsieur [S] à 1688,79 euros.

Par conséquent

-‘ Condamner’ la’ société Sig’Rest’ à’ payer’ à’ Monsieur’ [S]’ les’ sommes’ suivantes, outre le paiement des intérêts de droit correspondant à compter du jour de la date de’ la demande :

”40.530,96 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement nul à titre principal, ou 32.087,01 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

” 20 265, 48 euros à titre de dommages-intérêts réparant l’entier préjudice de Monsieur [S] résultant de la discrimination subie,

”13.059,96 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement (7,9 mois de salaires),

”3.377,58 euros au titre de l’indemnité de préavis (2 mois de salaires),

”1.688,79 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture vexatoire,

”150 euros’ au’ titre’ de’ l’argent’ liquide’ confisqué’ illicitement’ à’ Monsieur [S] en date du 18 avril 2018.

– Condamner la Société Sig’Rest à payer à Monsieur [S] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– Condamner la Société Sig’Rest aux dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par RPVA le 1er septembre 2021 auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens, la société Sig’Rest, intimée, demande à la cour de’:

– Confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a débouté Monsieur [S] de ses demandes,

– Infirmer le jugement en ce qu’il a débouté la société de voir condamner Monsieur [S] :

o’ à payer 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

o’ à payer 150 euros

A titre reconventionnel, si la cour devait juger infirmer le jugement :

-Ramener le montant dû au titre’ de’ l’indemnité’ compensatrice’ de’ préavis’ à 3021,34 euros bruts outre 302,13 euros bruts au titre des congés payés,

En tout état de cause :

– Condamner Monsieur [S] à 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 7 décembre 2022.

SUR CE,

Sur le harcèlement moral, la dicrimination et la nullité du licenciement

Monsieur [S] fait valoir à la fois qu’il a subi un harcèlement moral et une discrimination’;

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ;

Selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ;

Vu les articles L1152-1 et L1254-1 du code du travail,

Il résulte de ces textes que lorsque la salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral ; dans l’affirmative, il appartient à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ;

En application de l’article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap’;

Selon l’article 1er de la loi n°’2008-496 du 27’mai’2008 portant diverses mesures d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations :

– constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie ou une race, sa religion, ses convictions, son âge, son handicap, son orientation sexuelle ou de son sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne l’aura été dans une situation comparable,

– constitue une discrimination indirecte une disposition, un critère ou une pratique neutre en apparence, mais susceptible d’entraîner, pour l’un des motifs précités, un désavantage particulier pour des personnes par rapport à d’autres personnes, à moins que cette disposition, ce critère ou cette pratique ne soit objectivement justifié par un but légitime et que les moyens pour réaliser ce but ne soient nécessaires et appropriés,

– la discrimination inclut’tout agissement lié à l’un des motifs précités et tout agissement à connotation sexuelle, subis par une personne et ayant pour objet de porter atteinte à sa dignité ou de créer un environnement hostile, dégradant, humiliant ou offensant’;

L’article L.1134-1 du code du travail prévoit qu’en cas de litige relatif à l’application de ce texte, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, et le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles’;

En l’espèce, Monsieur [S], qui soutient qu’il a subi un harcèlement moral et une discrimination, invoque les faits suivants’: un harcèlement par son supérieur et par son directeur, en l’humiliant et le rabaissant et le poussant à bout et en ne respectant pas ses restrictions médicales alors qu’il avait fait l’objet d’un aménagement de poste’; il ajoute que ses conditions de travail se sont alors considérablement dégradées, que son état de santé a été systématiquement stigmatisé, estimant avoir subi une discrimination à raison de son âge et de son état de santé’;

Pour étayer ses affirmations, il produit notamment une ordonnance médicale du 1er décembre 2017, un signalement au CHSCT, sa fiche d’aptitude médicale du 5 décembre 2017 et se réfère à ses dires selon lesquels son supérieur hiérarchique est constamment derrière lui, communique des informations fausses au directeur et prétend qu’il refuse certaines tâches sous prétexte de se cacher derrière les restrictions médicales de la médecine du travail’;

Par un courrier du 19 octobre 2017, Monsieur [S] a saisi le CHSCT en invoquant un «’harcèlement’»’;

Une enquête a été diligentée par l’employeur avec le CHSCT’;

Une ordonnance a par ailleurs prescrit des médicaments à Monsieur [S] le 1er décembre 2017′;

Il ressort uniquement du compte-rendu de séance du CHSCT du 20 décembre 2017 que, «’sur le problème de harcèlement’», « les protagonistes ont été entendus dans le cadre de l’enquête menée par le CHSCT’; que suite à la saisine de celui-ci par un salarié, une explication a pu avoir lieu entre les parties le résultat de l’enquête fait ressortir que sa demande était justifiée, que sa demande d’arrêt de pressions a été satisfaite, que le manager en cause a pu s’expliquer.’»’;

La fiche médicale du 5 décembre 2017 du médecin du travail est un avis déclarant Monsieur [S] «’apte’» à son travail, avec ces seules restrictions: «’pas d’exposition à une température de moins de 5°, pas d’exposition au port de charges de plus de 5 kg, pas de travail en hauteur. Affectation préférentielle au poste d’hôte de caisse.’»’;

Il n’est pas établi que Monsieur [S], qui était âgé de 50 ans au moment de son licenciement et qui avait la charge de l’encaissement d’achats des clients, ait été exposé à une température de moins de 5° ni au port de charges de plus de 5 kg ni à un travail en hauteur, ce qu’il n’allègue d’ailleurs pas, ni que son affectation ait été en contradiction avec cet avis du médecin du travail, ni que son âge ou son état de santé aient été stigmatisés’;

En l’état des explications et des pièces fournies, seule l’existence d’éléments de fait précis et concordants relatifs à des pressions laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral’; l’employeur ne prouve pas que de tels agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement ;

En revanche, en l’état des explications et pièces fournies et alors que Monsieur [S] procède pour sa part sur ce point par simples affirmations, la matérialité d’éléments de fait précis et concordants laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte fondée sur l’âge ou l’état de santé, au sens des textes susvisés n’est pas démontrée’; la demande de dommages et intérêts relative à la discrimination sera par conséquent rejetée’;

Monsieur [S] ne formule pas de demande de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral mais soutient que son licenciement est nul pour être lié à sa dénonciation de faits de cette nature’; il ajoute que son employeur a voulu se débarrasser d’un salarié (lui-même) vieillissant et malade’;

Selon l’article L.1152-3 du même code, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ;

De même, selon l’article L.1152-2 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral et pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés ;

En application de l’article’L.1132-4 du code du travail, le licenciement intervenu dans ce contexte est nul’;

Si en application de textes précités le salarié qui relate des faits de harcèlement moral ou de discrimination ne peut être licencié pour ce motif, sauf mauvaise foi, laquelle ne peut résulter de la seule circonstance que les faits ne sont pas établis, la société Sig’Rest rappelle justement et justifie qu’en l’espèce, d’une part, 7 mois se sont écoulés entre la dénonciation de faits de harcèlement moral par Monsieur [S] et son licenciement, sans concomitance entre ces deux actes et d’autre part et surtout, que le licenciement ne fait aucunement référence à des faits de harcèlement ou leur dénonciation ni davantage à la dénonciation d’une discrimination mais a été notifié au motif de griefs se rapportant à des fautes du salarié dans le cadre de la manipulation des caisses’;

Il ressort des motifs ci-après que la faute du salarié est établie’et que son comportement fautif constitue la cause réelle et sérieuse du licenciement’;

En conséquence, les demandes relatives à la nullité du licenciement seront rejetées ;

Sur la faute grave à l’origine du licenciement

En application de l’article L. 1232-1 du code du travail un licenciement doit être justifié par une cause réelle et sérieuse ;

Si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n’appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d’instruction qu’il juge utile, il appartient néanmoins à l’employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ;

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée du préavis ; la charge de la preuve incombe à l’employeur qui l’invoque ;

La lettre de licenciement reproche à Monsieur [S] un non-respect des procédures de caisses et la manipulation des caisses générant une mauvaise comptabilité et la dissimulation d’argent liquide, notamment des billets de 50 euros, engendrant une perte financière pour l’entreprise’;

La société Sig’Rest produit aux débats à la fois un constat d’huissier de justice exploitant la vidéo-surveillance de l’établissement, les plaintes déposées par la société et constats dressés par les services de police ainsi que deux attestations de salariés’;

Elle justifie par ailleurs que la vidéo-surveillance de l’établissement’avait été portée à la connaissance du salarié, produisant la lettre d’information sur la vidéo protection, les déclarations à la CNIL et la remise du règlement intérieur signée par Monsieur [S] ;

Ainsi, notamment, Madame [L], atteste avoir «’constaté que Monsieur [S] [O] à plusieurs reprises ne rendait pas correctement la monnaie à de jeunes étrangers ado. (‘), a encaissé une sucette, des pâtes et une bouteille d’ Oasis sans les typer sur la caisse (…)’»’;

Dans son procès-verbal de constat du 21 février 2019 l’huissier de justice indique notamment, après avoir visionné les video-surveillance de l’établissement’:

« Je vois que la femme recompte et ne semble pas satisfaite. L’instant d’après Monsieur [S] sort un ticket de caisse et remet 10 euros », « lorsque la cliente récupère la monnaie, elle n’a pas l’air satisfaite et je vois Monsieur [S] ouvrir le tiroir-caisse, prendre la pièce et lui transmettre » , et’: « constatons que la cliente remet un billet de 50 euros. Le caissier remet à cette dernière un billet de 10 euros et jette le ticket. A 16h06, constatons que le caissier ouvre la caisse et qu’il manipule des billets de 50 euros. Constatons ensuite que ce dernier s’écarte de la caisse et se dirige dans l’angle mort de la caméra. A 16h09, constatons que le caissier comptabilise quinze billets de 20 euros qu’il envoie directement dans un tube qui part directement au coffre mais aucun billet de 50 euros »’;

Le décompte de caisses révèle que trois billets de 50 euros manquaient, alors que les relevés de ces caisses font état de 11 billets de 50 euros et qu’il ressort du constat d’huissier que l’intéressé avait reçu à son poste 15 billets de 50 euros et en avait rendu un seul’;

Indépendamment des espèces retrouvées sur la personne de Monsieur [S], que celui-ci a accepté de remettre lorsqu’il lui a été demandé de vider ses poches, la preuve du manque d’argent liquide en caisse découle des autres modes de preuve susvisés’;

Monsieur [S] affirme ensuite que l’argent manquant, qu’il détenait sur lui le 18 avril 2018 provenait d’un ‘pari heureux au courses’; s’il produit la copie d’un ticket de PMU mentionnant des gains de 1 371,90 euros, ce ticket est daté du 20 mars 2018 et, surtout, n’est pas nominatif’; le salarié procède encore par voie de simple affirmation, non corroborée d’autres éléments, lorsqu’il ajoute qu’il comptait alors faire changer les pneus neige de sa voiture’;

Les faits reprochés au salarié sont établis. S’ils ne rendent pas impossible son maintien dans l’entreprise, au regard de sa très grande ancienneté et de l’absence d’antécédent disciplinaire au cours des trois années précédant l’engagement de la procédure de licenciement, ils caractérisent néanmoins une faute constituant une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Le jugement est réformé en ce sens’;

Il convient en conséquence, sur la base d’un salaire de référence de 1 688,79 euros d’allouer au salarié les sommes de :

– 13.059,96 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

-‘3.377,58 euros bruts au titre de l’indemnité de préavis ;

et de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La preuve de circonstances vexatoires de la rupture du contrat de travail de nature à causer à Monsieur’ [S] un préjudice distinct de celui résultant de la perte, justifiée, de son emploi n’étant pas rapportée, le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts au titre d’une rupture vexatoire ;

Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur’ [S]’de sa demande de condamnation de l’employeur à lui restituer la somme de 150 euros.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens

Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera confirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens d’appel seront mis à la charge de la société Sig’Rest’;

Il est conforme à l’équité de laisser à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d’appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement,

Confirme le jugement entrepris, sauf en ses dispositions relatives à la faute grave, à l’indemnité conventionnelle de licenciement et à l’indemnité de préavis,

Statuant de nouveau du chef des dispositions infirmées,

Dit que le licenciement de Monsieur [O] [S] est fondé sur une cause réelle et sérieuse,

Condamne la SA Sig’Rest à payer à Monsieur [O] [S] les sommes de :

– 13.059,96 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

-‘3.377,58 euros bruts à titre d’indemnité de préavis,

Condamne la SA Sig’Rest aux dépens d’appel,

Laisse à la charge de chacune des parties les frais par elles exposés en cause d’appel et qui ne sont pas compris dans les dépens.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Régine CAPRA, Présidente et par Madame Sophie RIVIERE, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,  

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