En matière de cession de fonds de commerce, sans qu’il soit besoin de faire application de la législation relative au traitement automatisé des fichiers de données à caractère personnel, la société la Danseuse (cessionnaire) ne rapporte pas que le fichier des clients cédé était un élément du fonds de commerce, déterminant de son consentement à la vente, de sorte qu’aucune nullité pour dissimulation du caractère supposé illicite du fichier de clients cédé n’est encourue.

A noter que le  fichier litigieux était un fichier des clients inscrits à la lettre d’information (newsletter) du site du cédant, le non-respect de l’obligation de déclaration CNIL du fichier, si elle avait été établie, n’était pas sanctionné par la nullité de la cession.

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REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

Chambre commerciale

ARRET DU 09 NOVEMBRE 2021

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/02781 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OD24

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 MARS 2019

TRIBUNAL DE COMMERCE DE MONTPELLIER

N° RG 2018002941

APPELANTE :

SARL LA DANSEUSE

[…]

[…]

R e p r é s e n t é e p a r M e J a u f f r é C O D O G N E S d e l a S E L A S RAYNAUD-FALANDRY-CODOGNES-BOTTIN, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIMEES :

SARL CAVALIERE représentée en la personne de son gérant, domicilié ès qualités au dit siège social

C/O Mme X

[…]

[…]

Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représentée par Me Anne-Sophie TURMEL, avocat au barreau de NIMES, avocat plaidant

S.C.I. DE L’ATELIER représentée par son gérant, domicilié ès qualités au dit siège social

[…]

[…]

Représentée par Me Christine AUCHE HEDOU de la SCP AUCHE HEDOU, AUCHE – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant

Représentée par Me Anne-Sophie TURMEL, avocat au barreau de NIMES, avocat plaidant

Ordonnance de clôture du 14 Septembre 2021

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 OCTOBRE 2021, en audience publique, Madame Anne-Claire BOURDON, Conseiller ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre

Mme Anne-Claire BOURDON, Conseiller

Mme Marianne ROCHETTE, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Audrey VALERO

ARRET :

— Contradictoire

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

— signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.

*

* *

FAITS, PROCEDURE – PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par acte sous seing privé du 13 mars 2017, prenant effet le 1er mars 2017, la SARL la Danseuse a acquis auprès de la SARL Cavaliere un fonds de commerce de « salon de thé, petite restauration à emporter, cours de cuisine, organisation d’événements, de réception, club de gourmets et de dégustation », sous l’enseigne commerciale « l’atelier de Valérie », situé […] à Montpellier au prix de 90’000 euros.

Par acte sous seing privé du 2 mars 2017, prenant effet le 1er mars 2017, la SCI de l’Atelier a consenti un nouveau bail commercial à la société la Danseuse portant sur les locaux d’exploitation du fonds de commerce cédé pour un loyer annuel de 27 360 euros TTC.

Saisi par acte d’huissier en date du 13 février 2018 délivré par la société la Danseuse, le président du tribunal de grande instance de Montpellier, statuant en référé, a, par ordonnance en date du 28 juin 2018, ordonné une mesure d’expertise destinée, principalement, à rechercher l’existence des vices allégués (équipements défectueux et malfaçons affectant le local).

Saisi par acte d’huissier en date des 13 février et 6 juin 2018 délivrés par la société la Danseuse, le tribunal de commerce de Montpellier, après avoir prononcé une jonction, a, par jugement du 25 mars 2019,

« - (…) confirmé la validité des assignations délivrées par la société la Danseuse le 13 février 2018 à l’encontre de la société Cavalière et le 6 juin 2018 à l’encontre de la SCI de l’atelier,

– débouté la société la Danseuse de sa demande de nullité de la cession de fonds de commerce signé le 2 mars 2017,

– débouté la société la Danseuse de toutes ses autres demandes,

– condamné la société la Danseuse à payer à la société Cavaliere la somme de 1 074,50 euros au titre de 10/12è de la CFE pour l’année 2017,

– débouté la société Cavaliere de sa demande de dommages-intérêts,

– rejeté la demande d’exécution provisoire,

– condamné la société la Danseuse à payer à la société Cavalière et à la SCI de l’Atelier la somme de 1 000 euros à chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens. »

Par déclaration reçue le 23 avril 2019, la société la Danseuse a régulièrement relevé appel de ce jugement.

Le 6 juin 2019, la société la Danseuse a indiqué refuser la mesure de médiation, proposée le 17 mai 2019.

Elle demande à la cour, en l’état de ses conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 6 décembre 2019, de :

« - (…) dire irrecevable les prétentions nouvelles et l’appel incident de la SARL Cavaliere et de la SCI de l’Atelier,

– réformer le jugement (…) et statuant à nouveau,

– dire :

– que la cession du fonds de commerce en date du 13 mars 2017, intervenue entre la SARL Cavaliere et elle-même est entachée de nullité,

– que le contrat de bail intervenu entre la SCI de l’Atelier et elle-même est interdépendant de la cession du fonds de commerce,

– nulle la cession intervenue entre la SARL Cavaliere et elle-même ainsi que le contrat de bail intervenu entre la SCI de l’Atelier et elle-même,

– ordonner le retour au statu quo ante,

– condamner la SARL Cavaliere à lui restituer la somme de 90 000 euros à charge pour elle de restituer le fonds,

– condamner la SARL Cavaliere à lui payer la somme de 80 000 euros en réparation des préjudices subis,

– condamner la SCI de l’Atelier à lui restituer les loyers perçus depuis le 13 mars 2017 soit la somme de 72 600 euros (2 200 euros x 33 mois ‘ arrêté au 13 décembre 2019),

– condamner la SARL Cavaliere aux dépens,

– condamner la SARL Cavaliere à lui payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la SCI de l’Atelier à lui payer la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouter la SARL Cavaliere et la SCI de l’Atelier de toutes leurs demandes. »

Au soutien de son appel, elle fait essentiellement valoir que :

— aucun acte de cession en date du 21 novembre 2016 n’est versé aux débats,

— l’acte de vente du 13 mars 2017 ne mentionne que le chiffre d’affaires et le résultat commercial des exercices 2013, 2014, 2015, et non le résultat d’exploitation de l’année 2016 et du premier trimestre 2017,

— la société Cavaliere a dissimulé des informations relatives au bilan de l’année 2016, dont elle disposait deux jours avant la date de cession (bilans et comptes de résultats de l’année 2016 datés du 11 mars 2017), ces man’uvres tendant à dissimuler une perte de plus de 14’000 euros au titre de trois années consécutives de déficit,

— les tâches qu’elle a pu accomplir au sein du fonds de commerce avant la cession sont sans lien avec la gestion de la société et ne lui permettait pas d’appréhender l’état financier du fonds de commerce,

— la gérante de la société la Danseuse était inexpérimentée dans le monde des affaires,

— les échanges entre les deux gérantes ne traitent pas de la situation financière du fonds, la gérante de la société Cavaliere est seule à l’origine de la rédaction du prévisionnel,

— au titre des éléments du fonds cédé, les fichiers clients n’ont pas été déclarés auprès de la commission nationale informatique et libertés-CNIL, de sorte que la cession du fonds de commerce porte sur un élément contraire à l’ordre public,

— elle a été victime de manœuvres dolosives par la dissimulation de la réalité de la situation économique en l’absence, outre les mentions prescrites quant aux résultats, d’inventaire, de communication du bail commercial et de toutes informations sur l’état des équipements et des murs,

— subsidiairement, les défauts du fonds de commerce relatifs à la vétusté des murs et du matériel, à la clientèle inexistante, au caractère périmé des marchandises constituent des vices cachés,

— les demandes reconventionnelles et les prétentions nouvelles de la SCI de l’Atelier et de la société Cavaliere seront déclarées irrecevables à défaut de toute critique au titre de l’appel incident d’autres chefs de jugement que ceux contenus dans la déclaration d’appel,

— une tentative de résolution amiable préalable à l’assignation introductive d’instance a été effectuée (courriel du 7 août 2017)

— la gérante de la société Cavaliere tente par le biais de la procédure relative au bail commercial de récupérer le local sans en restituer le prix.

Formant appel incident, la société Cavaliere et la SCI de l’Atelier sollicitent de voir, aux termes de leurs conclusions déposées et notifiées par voie électronique le 10 septembre 2019 :

« - (…) recevant les concluantes dans toutes ses demandes (…), y faisant droit, rejeter toutes prétentions adverses comme injustes et mal fondées,

– en conséquence, débouter la SARL la Danseuse de toutes ses demandes (…),

– confirmer la décision rendue,

– à titre incident, la réformer seulement en ce qu’elle les a déboutées de la condamnation de la SARL la Danseuse à leur verser la somme de 10 000 euros au titre de justes dommages et intérêts et vu notamment l’article 1104 du code civil, condamner la SARL la Danseuse à verser à la SARL Cavaliere et la SCI de l’Atelier la somme de 10 000 euros au titre de justes dommages et intérêts,

– à titre subsidiaire, dire que la cession du fonds de commerce et le bail signés le même jour constituent deux contrats interdépendants de sorte que la nullité ou la résolution judiciaire de la cession du fonds emporterait la caducité du bail commercial sans que la SARL la Danseuse ne puisse solliciter le remboursement des loyers versés depuis le 1er mars 2017,

– en toutes hypothèses, condamner la SARL la Danseuse à payer à la SARL Cavaliere et la SCI de l’Atelier1a somme de 2 500 euros chacune en application de l’article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens (y inclus ceux de première instance). »

Elles exposent en substance que :

— il n’y a eu aucune diligence préalable à la saisine du tribunal,

— la gérante de la société la Danseuse a eu la jouissance du fonds de commerce à compter du 1er mars 2017 et faisait partie intégrante du fonctionnement du fonds de commerce depuis novembre 2016 ; sa parfaite connaissance du fonds de commerce transparaît dans le dossier prévisionnel, elle a d’ailleurs négocié la valeur du fonds de commerce (promesse de vente de novembre 2016 portant sur un prix de vente de 110’000 euros),

— son action n’est que la réponse aux procédures en paiement de loyers engagés par la SCI de l’Atelier,

— lors de la signature du contrat de cession, le bilan n’était pas encore arrêté mais l’acte comprend le chiffre d’affaires mois par mois,

— la gérante de la société la Danseuse a eu accès à tous les bilans en octobre 2016 et l’inventaire a été dressé en sa présence et lui a été adressé en novembre 2016,

— lors de la seconde négociation, dont elle est à l’origine, elle n’a jamais indiqué que des informations nécessaires étaient manquantes,

— le dossier prévisionnel a effectivement été rédigé par le cabinet comptable de la société Cavaliere en collaboration avec la gérante de la société la Danseuse,

— suite à la cession il n’y a eu aucune revendication pendant plus de 10 mois,

— le non-respect des dispositions de l’article L 141-2 du code de commerce n’est pas sanctionné par la nullité de la cession,

— le fichier litigieux est un fichier des clients inscrits à la lettre d’information (newsletter) du site de l’Atelier, le non-respect de l’obligation de déclaration du fichier, si elle est établie, n’est pas sanctionné par la nullité de la cession,

— en réalité, la gérante de la société la Danseuse n’a pas su gérer correctement le fonds de commerce acquis (modification de la vaisselle -porcelaine/carton-, tâches dans les locaux à l’occasion de travaux de peinture, refus d’honorer des chèques cadeaux…),

— l’existence de remontées capillaires compte tenu de la situation du local dans le quartier Saint-Roch lui était connue,

— aucune garantie en application de l’article L 141-3 du code de commerce ne pourra être retenue, puisque l’acquéreur connaissait parfaitement la valeur du fonds de commerce et le gérant de la société la Danseuse du fait de son expérience professionnelle avait conscience de l’importance de satisfaire la clientèle,

— la société la Danseuse exploite le fonds de commerce dans les locaux loués et ne peut justifier d’un quelconque remboursement des loyers versés,

— la dévalorisation du fonds de commerce cédé porte préjudice à la société venderesse, qui ne peut plus arguer de la réussite de ce fonds de commerce avant la cession et au bailleur compte tenu des travaux très importants effectués sans son accord.

Il est renvoyé, pour l’exposé complet des moyens et prétentions des parties, aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

C’est en l’état que l’instruction a été clôturée par ordonnance du 14 septembre 2021.

MOTIFS de la DECISION :

1- En application de l’article 1137 du code civil, « le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des man’uvres ou des mensonges.

Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie. »

L’article L.141-1 du code de commerce dispose que :

« I. – Dans tout acte constatant une cession amiable de fonds de commerce, consentie même sous condition et sous la forme d’un autre contrat ou l’apport en société d’un fonds de commerce, sauf si l’apport est fait à une société détenue en totalité par le vendeur, le vendeur est tenu d’énoncer :

(…) 3° Le chiffre d’affaires qu’il a réalisé durant les trois exercices comptables précédant celui de la vente, ce nombre étant réduit à la durée de la possession du fonds si elle a été inférieure à trois ans ;

4° Les résultats d’exploitation réalisés pendant le même temps ;

5° Le bail, sa date, sa durée, le nom et l’adresse du bailleur et du cédant, s’il y a lieu.

II. – L’omission des énonciations ci-dessus prescrites peut, sur la demande de l’acquéreur formée dans l’année, entraîner la nullité de l’acte de vente. »

Selon l’article L.141-2 de ce code, « au jour de la cession, le vendeur et l’acquéreur visent un document présentant les chiffres d’affaires mensuels réalisés entre la clôture du dernier exercice comptable et le mois précédant celui de la vente.

Pendant une durée de trois ans à compter de l’entrée de l’acquéreur en jouissance du fonds, le vendeur met à sa disposition, à sa demande, tous les livres de comptabilité qu’il a tenus durant

les trois exercices comptables précédant celui de la vente.

Toute clause contraire est réputée non écrite.»

L’article L.141-3 suivant précise que « le vendeur est, nonobstant toute stipulation contraire, tenu de la garantie à raison de l’inexactitude de ses énonciations dans les conditions édictées par les articles 1644 et 1645 du code civil.(…) »

L’acte de cession du fonds de commerce, signé le 13 mars 2017, ne comporte que le chiffre d’affaires et le résultat commercial des exercices 2015 (97 758 euros et – 4 437 euros), 2014 (107 525 euros et 4 315 euros) et 2013 (115 426 euros et 8 716 euros) ainsi que le chiffre d’affaires mensuel de l’exercice 2016, à l’exclusion du résultat d’exploitation de l’année 2016, seules les dispositions de l’article L. 141-1 (et non L. 141-2) du code de commerce étant susceptibles d’entraîner la nullité de l’acte.

Ces données montrent clairement que l’activité n’était plus bénéficiaire dans le cadre d’une diminution régulière et significative du chiffre d’affaires et des résultats chaque année sur les quatre années précédant la vente.

Les documents comptables de l’exercice 2016, certes édités par le cabinet comptable de la société cédante le 11 mars 2016 sans, pour autant, que leur transmission à cette dernière à cette date ne soit rapportée, ne font que confirmer ces informations (chiffre d’affaires : 85 430 euros et résultat : -13 980 euros) tandis que la société la Danseuse ne rapporte pas en quoi l’omission avérée, quoique limitée au seul résultat pour l’exercice précédant la vente, a vicié son comportement, et n’indique précisément quelles informations essentielles et déterminantes de son consentement ce dernier document contenait (le chiffre d’affaires mensuel des mois de janvier et février 2017 n’y figurant pas) et lui ont été dissimulées.

Entre le mois de novembre 2016, date d’un précédent acte de cession entre les parties n’ayant pas abouti, et le mois de février 2017, le prix du fonds de commerce a été revu à la baisse dans le cadre d’une négociation entre elles, dont les échanges de courriels et SMS, versés aux débats, qui concernent, notamment, l’aspect comptable et économique de la vente, témoignent, ceux-ci attestant de la transmission d’éléments comptables pour l’année 2016 et de l’inventaire (échanges de courriels des 11 octobre et 26 et 27 novembre 2016).

Si le ‘dossier prévisionnel’, en date du 7 novembre 2016, soumis aux établissements bancaires par la société la Danseuse pour obtenir un financement lui permettant d’acquérir le fonds de commerce concerné a effectivement été établi par le cabinet comptable de la société Cavaliere, sa lecture enseigne que la société la Danseuse en était co-rédactrice, celui-ci exposant, outre des éléments personnels concernant le cursus professionnel de sa gérante, des éléments propres au projet du cessionnaire, tels que la poursuite de l’activité existante avec le développement d’un nouveau marché de restauration (faisant l’objet d’un budget spécifique) et le développement de l’activité épicerie fine (avec un autre budget) et qu’elle est donc à l’origine du prévisionnel relatif au chiffre d’affaires déclaré à hauteur de 153’000 euros pour l’année 2017 (alors que celui-ci était compris de façon décroissante entre 115 000 et 97 000 euros depuis trois ans).

Si l’inventaire n’était pas annexé à l’acte de cession, sans pour autant constituer une omission susceptible d’ouvrir un cas de nullité de l’acte, la gérante de la société la Danseuse a pendant six mois exécuté différentes fonctions et activités au sein de la société cédante (préparation de recettes, courses, cours …), lui ayant permis d’apprécier la consistance et l’état du matériel cédé, qu’elle a accepté d’acquérir pour une valeur de 20 000 euros ainsi que ceux des locaux dans lesquels était exploité le fonds de commerce. Au demeurant, il résulte des échanges entre les parties visés ci-dessus que l’inventaire a été remis au cessionnaire avant la cession.

Outre la cession du fonds, la société la Danseuse a signé un nouveau bail commercial le 2 mars 2017, dans lequel elle a indiqué ‘bien connaître les biens immobiliers pour les avoir visités’ alors qu’au demeurant, elle y a exercé une activité professionnelle pendant six mois, qu’elle a signé l’état des lieux d’entrée et n’a fait état d’aucune difficulté avant janvier 2018 alors que le bailleur a dû, dès le mois de mois de juillet 2017, lui faire délivrer un commandement de payer.

Sans qu’il soit besoin de faire application de la législation relative au traitement automatisé des fichiers de données à caractère personnel, la société la Danseuse ne rapporte pas que le fichier des clients cédé était un élément du fonds de commerce, déterminant de son consentement à la vente, de sorte qu’aucune nullité pour dissimulation du caractère supposé illicite du fichier de clients cédé n’est encourue.

La société la Danseuse ne rapporte pas davantage l’existence de vices cachés, à défaut d’établir la matérialité de désordres allégués, touchant à la vétusté des murs et du matériel au regard de sa connaissance des lieux et des équipements, à l’inexistence de la clientèle au regard de ses propres déclarations dans le document prévisionnel (page 16 : la clientèle est existante dans le cadre d’une suite d’activité ) et au caractère périmé des marchandises en l’absence de tout élément probant, qui rendent impropre à son usage le fonds de commerce acquis, alors qu’elle ne se prévaut nullement de toute difficulté, voire impossibilité à l’exploiter à l’appui de toute pièce justificative tandis que la société Cavaliere verse aux débats de nombreuses attestations d’anciens clients indiquant que l’offre et l’accueil au sein du fonds de commerce ayant changé, ils ont cessé de le fréquenter.

En conséquence, ni l’omission du résultat pour l’année 2016, ni les échanges entre les parties, ni l’assistance offerte par le cédant pour conclure la cession ne ressortent de manoeuvres dolosives de ce dernier visant à dissimuler l’état réel du fonds de commerce cédé, qui transparaît dans les données transmises. L’acte de cession du 13 mars 2017 n’encourant aucune nullité, les demandes de la société la Danseuse relatives à la cession du fonds et au bail commercial ne pourront donc qu’être rejetées.

2- Si la société Cavaliere et la SCI de l’Atelier font valoir qu’il n’y a eu aucune diligence préalable à la saisine du premier juge, elles n’en tirent aucune conséquence juridique et la cour n’est saisie d’aucune demande à ce titre.

La demande de condamnation à des dommages-intérêts formée par la société Cavaliere et la SCI de l’Atelier à titre incident dans le respect des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile figure dans les (seules) conclusions déposées et notifiées le 10 septembre 2019 par celles-ci, soit dans le délai de trois mois ayant couru à compter du 18 juillet 2019, date du dépôt de celles de la société appelante tandis que la société Cavaliere et la SCI de l’Atelier ont déjà formé une telle demande devant le premier juge.

L’irrecevabilité de cette demande d’indemnisation, tirée du non-respect des articles 909 et 564 du code de procédure civile, sera donc rejetée.

Toutefois, la société Cavalière ayant cédé son fonds de commerce, elle ne peut considérer, selon son expression, « l’avoir perdu » au titre de sa renommée du fait des nouvelles activités de son successeur, ne rapportant la matérialité d’aucun préjudice en découlant. De même, compte tenu de l’expertise judiciaire en cours relative au bail commercial, la SCI de l’Atelier ne rapporte pas l’existence d’un préjudice découlant des violations dudit bail, dont elle se prévaut.

Leur demande de dommages et intérêts sera donc rejetée.

3- En application de l’article 9 de l’acte de cession, le cessionnaire étant tenu de supporter la contribution foncière aux entreprise (CFE) à compter de la jouissance du fonds, la société la Danseuse, qui n’a pas conclu sur ce point, doit régler à la société Cavaliere la somme de 1 074,50 euros au titre du solde du dixième (sur douze mois) du montant de cette taxe (qui n’est pas contesté).

Le jugement sera donc confirmé dans toutes ses dispositions soumises à la cour.

4- Succombant sur son appel, la société la Danseuse sera condamnée aux dépens et au vu des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, à payer la somme de 3 000 euros, sa demande sur ce fondement étant rejetée.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Constate que la cour n’est saisie d’aucune demande relative à la saisine du premier juge,

Rejette l’irrecevabilité, tirée du non-respect des articles 909 et 564 du code de procédure civile, de la demande de dommages-intérêts formée par la SARL Cavalière et la SCI de l’Atelier,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Montpellier en date du 25 mars 2019 dans ses dispositions soumises à la cour,

Condamne la SARL la Danseuse à payer à la SARL Cavalière et à la SCI de l’Atelier la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette la demande de la SARL la Danseuse fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SARL la Danseuse aux dépens d’appel.

Le greffier, le président,

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