Le système de Badging du groupe Audiens a été validé par les juridictions, la preuve des horaires de travail des salariés peut donc être rapportée par un rapprochement entre d’une part la liste des badgeages du salarié, telle que répertoriée par le logiciel Octime et d’autre part l’historique de la fréquentation, par le salarié, de la cantine de la société.

Un salarié licencié s’est fondé sur les articles 1 à 7 de la norme simplifiée de la CNIL et l’article 6 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés pour contester les modalités de contrôle de ses horaires de travail.

Groupe Audiens avait déclaré au titre de la norme simplifiée de la CNIL l’utilisation d’un logiciel dédié, dont il est bien précisé qu’il a trait à la restauration mais aussi à la gestion des horaires. Il résulte de la norme simplifiée 42 de la CNIL que les données de badgeage sont conservées de la façon suivante’:

. s’agissant des éléments d’identification’: 5 ans après le départ du salarié.

. s’agissant des éléments relatifs aux déplacements des personnes’: 3 mois.

. traitement ayant pour finalité le contrôle du temps de travail : 5 ans.

. données relatives aux motifs d’absence : 5 ans (sauf dispositions législatives contraires).

. données relatives au paiement des repas : 3 mois pour les données monétiques et 5 ans en cas de paiement par retenue sur salaire.

Comme il résulte de la déclaration faite par l’employeur à la CNIL, la finalité déclarée était la suivante’: «’CONTROLE ACCES AUX LOCAUX GESTION HORAIRES ET RESTAURATION’». Cet intitulé permet de rattacher la finalité du contrôle et des données au «’Traitement ayant pour finalité le contrôle du temps de travail’» et, par conséquent, pouvait être conservé durant 5 ans et non 3 mois.

Par ailleurs, le salarié a été averti de la finalité du badgeage dès lors que ‘ notamment ‘ l’accord d’entreprise du 7 janvier 2004 (pièce 13 E p. 13 et p. 17) prévoyait’:

«’13.1. Obligation pour tous de badger

Conformément à l’article L. 620-2 du code du travail, le temps de travail est décompté individuellement. A cet effet, un dispositif de pointage par badge est appliqué pour l’ensemble du personnel, permettant ainsi la mise en place des horaires individualisés (‘)’».

. en son article 15′:

«’Article 15 Principe’: temps badgé = temps travaillé

15.1. Utilisation du badge

L’utilisation du badge (‘) permet la mise en place des horaires individualisés au bénéfice de l’ensemble des salariés. Un tel système repose sur l’autodiscipline, la responsabilité individuelle et collective et la confiance. Dans une même journée, le nombre de pointages n’est pas limité. Tout enregistrement «’entrée’» doit être suivi d’un enregistrement «’sortie’» dans la même journée’; tout enregistrement «’sortie’» doit être précédé d’un enregistrement «’entrée’» dans la même journée (‘)

15.4. Régularisation de compteur

En cas d’anomalie sur compteur ou oubli de badger, une procédure d’information du salarié concerné sera mise en place’; le compteur du salarié sera rectifié sur présentation d’une fiche de régularisation horaires validée par son responsable de service ou de département.’»

Compte tenu des éléments qui précèdent, le recueil des données ayant fondé le licenciement n’était pas illicite.

___________________________________________________________________________________________

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

Code nac : 80A

17e chambre

ARRÊT DU 26 MAI 2021

N° RG 19/01644

N° Portalis DBV3-V-B7D-TC7B

AFFAIRE :

B X

C/

Association GROUPE AUDIENS

Syndicat CGT DES PERSONNELS DU GROUPE AUDIENS

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 6 octobre 2015 par le Conseil de Prud’hommes Formation paritaire de BOULOGNE BILLANCOURT

Section : AD

N° RG : F 13/01173

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées

à :

Me Ghislain DADI

Me Anne-Charlotte PASSELAC

M. D Z (Défenseur syndical)

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SIX MAI DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur B X

de nationalité française

[…]

[…]

[…]

Comparant et assisté de Me Ghislain DADI de la SELASU DADI AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0257

APPELANT


Association GROUPE AUDIENS

[…]

[…]

Représentée par Me Anne-Charlotte PASSELAC de la SELARL ODINOT & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : L0271

INTIMÉE


Syndicat CGT DES PERSONNELS DU GROUPE AUDIENS

[…]

[…]

Non comparant, non représenté

Syndicat INFO’COM – CGT/CSTP

[…]

[…]

Représenté par M. D Z (défenseur syndical muni d’un pouvoir permanent accepté par la cour)

PARTIES INTERVENANTES

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 26 Mars 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente et Monsieur Laurent BABY, conseiller, chargés du

rapport.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Madame Régine CAPRA, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Stéphanie HEMERY

Par jugement du 6 octobre 2015, le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt (section

activités diverses) a’:

— condamné l’association Groupe Audiens à verser à M. B X la somme de

2 579,76 euros au titre de la requalification de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée,

— dit que le licenciement de M. X est sans cause réelle et sérieuse,

— condamné l’Association Groupe Audiens à verser à M. X les sommes suivantes’:

. 2 579,76 euros à titre de préavis,

. 257,97 euros au titre des congés payés y afférents,

. 1 805,83 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

. 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif,

. 950 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné le Groupe Audiens à verser au Syndicat CGT des Personnels du Groupe Audiens la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration adressée au greffe le 20 octobre 2015, M. X a interjeté appel de ce jugement.

Une ordonnance de retrait du rôle a été prononcée le 21 juin 2017 à la demande des parties et l’affaire a été réinscrite au rôle le 8 février 2019.

L’affaire a été appelée à l’audience du 26 mars 2021.

Par conclusions visées par le greffier et oralement soutenues à l’audience par son conseil, l’association Groupe Audiens demande à la cour de’:

— la recevoir en ses écritures et y faisant droit,

— dire que le licenciement de M. X n’a aucun lien avec les arrêts maladie dont il a fait l’objet,

— dire que les données collectées dans le cadre de la gestion des horaires et de la restauration l’ont été de façon licite,

— dire qu’aucune violation des droits de la défense ne peut lui être reprochée dans le cadre de la procédure de licenciement,

— dire que le licenciement repose sur une faute grave objective et démontrée,

— confirmer en conséquence le jugement rendu en ce qu’il a écarté les moyens tirés de la prétendue nullité du licenciement,

— infirmer le jugement rendu en ce qu’il a jugé le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et débouter M. X de l’ensemble de ses demandes à ce titre,

— dire irrecevable et en toute hypothèse infondée l’intervention volontaire du Syndicat Info’com-CGT/CSTP,

subsidiairement,

— réformer le quantum de l’indemnité de préavis allouée à M. X et la fixer à la somme de 2’326,41 euros et les congés afférents à la somme de 232,64 euros,

— réformer le quantum de l’indemnité de licenciement allouée à M. X et le fixer à la somme de 891,79 euros,

— confirmer le jugement en ce qu’il a alloué 1 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à M. X,

sur la requalification du contrat de mission,

— infirmer le jugement rendu en ce qu’il a fait droit à la demande de requalification du contrat de mission en contrat de travail à durée indéterminée,

— débouter en conséquence M. X de sa demande indemnitaire à ce titre,

— réformer, subsidiairement, le quantum de l’indemnité allouée à M. X et le fixer à

2 326,41 euros,

en tout état de cause,

— infirmer le jugement rendu en ce qu’il a fait droit à la demande indemnitaire du Syndicat CGT des Personnels du Groupe Audiens,

— débouter le Syndicat Info’com-CGT/CSTP de sa demande indemnitaire,

— infirmer encore le jugement rendu en ce qu’il a alloué une somme au Syndicat CGT des Personnels du Groupe Audiens et à M. X au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouter le Syndicat CGT des Personnels du Groupe Audiens et M. X de leurs demandes à ce titre,

— condamner M. X et le Syndicat CGT des Personnels du Groupe Audiens in solidum à lui payer la somme de 2 500 sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner M. X et le Syndicat CGT des Personnels du Groupe Audiens in solidum aux entiers dépens.

Par conclusions visées par le greffier et oralement soutenues à l’audience par son conseil, M. X demande à la cour de’:

— fixer son salaire mensuel de référence à la somme de 2 579,76 euros brut,

— dire le licenciement nul pour raison discriminatoire et pour violation des droits de la défense ou à titre subsidiaire sans cause réelle et sérieuse,

à titre principal,

— infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande principale,

— ordonner la remise en état de son contrat de travail et sa réintégration effective et satisfactoire,

à titre subsidiaire,

— confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamné la société à 1 000 euros de dommages et intérêt mais y ajouter une indemnité afférente de 57 976,29 euros,

à titre très subsidiaire,

— confirmer les condamnations suivantes’:

. 2 579,76 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

. 257,79 euros à titre d’indemnité de congé payé,

. 1 805,83 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

en tout état de cause,

— confirmer les condamnations suivantes’:

. 2 579,76 euros à titre d’indemnité de requalification du CDD en CDI,

. 950 euros mais y ajouter 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la société aux entiers dépens,

— ordonner l’exécution provisoire.

Par conclusions visées par le greffier et oralement soutenues à l’audience par son conseil, le Syndicat Info’com-CGT/CSTP demande à la cour de condamner l’association Groupe Audiens à lui payer les sommes de 5’000 euros à titre de dommages-intérêts sur le fondement de l’article L. 2132-3 du code du travail’et de’1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Syndicat CGT des Personnels du groupe Audiens, intervenant volontaire, régulièrement convoqué par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 16 juin 2020 dont il a été accusé réception le 18 juin 2020, n’était ni présent, ni représenté. La présente décision sera donc réputée contradictoire.

LA COUR,

Le Groupe Audiens est une association à but non lucratif constituée entre diverses institutions de retraite complémentaire, des institutions de prévoyance et des mutuelles ‘uvrant dans le secteur de l’audiovisuel, de la presse, du spectacle et de la communication et dont le rôle est d’assurer la mise en commun de leurs moyens de gestion, ces activités couvrant notamment la gestion du personnel affecté aux opérations et activités communes.

M. X avait été mis à disposition du Groupe Audiens par l’agence d’intérim Eliness en qualité de technicien en comptabilité et ce, à compter du 10 juillet 2011.

M. X a été engagé par le Groupe Audiens en qualité de technicien comptabilité gestion, par contrat de travail à durée indéterminée en date du 19 septembre 2011.

Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraite complémentaire.

Le 2 janvier 2013, le supérieur hiérarchique de M. Y l’a prévenu qu’il n’avait pas «’débadgé’» lors de sa pause déjeuner.

Informé M. X a régularisé sa situation.

Le 8 janvier 2013, M. X a été placé en arrêt maladie du 9 janvier au 28 juillet 2013.

Par lettre du 27 février 2013, M. X a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement. Cet entretien a été reporté à plusieurs reprises à la demande de M. X.

M. X a reçu une seconde convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement par lettre du 14 mars 2013 puis une troisième convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement par lettre du 12 avril 2013.

M. X ne s’est présenté à aucun de ces entretiens.

M. X a été licencié pour faute grave par lettre du 17 mai 2013. La lettre de licenciement présente ainsi les griefs’: «’Nous avons été informés par votre supérieur hiérarchique que vous aviez enfreint, le 2 janvier 2013, les règles relatives aux horaires individualisés.

Lorsque vous avez évoqué ce point avec lui le 3 janvier 2013, vous lui avez confirmé avoir pris une pause déjeuner d’une demi-heure sans débadger. Vous avez d’ailleurs, à la suite de cet entretien, établi une régularisation manuelle d’horaire.

En considération de vos échanges avec votre responsable hiérarchique, nous avons effectué des vérifications qui nous ont conduits à constater que vous aviez commis 19 infractions à la réglementation en vigueur dans l’entreprise concernant les horaires individualisés entre janvier 2012 et janvier 2013.

Ces vérifications ont été opérées par comparaison entre’:

  • la liste des badgeages issue du logiciel de gestion du temps OCTIME sur la période considérée,
  • le relevé des passages à la cantine sur cette même période.

La comparaison entre ces deux états fait apparaître que 19 fois vous avez complètement ou partiellement déjeuné sur votre temps de travail. Il s’agit des 17 et 27 janvier 2012, des 6 et 29 février 2012, des 6 et 29 mars 2012, des 6 avril 2012, des 9 et 24 mai 2012, des 1er juin 2012, du 20 juillet 2012, des 10 et 13 août 2012, du 21 septembre 2012, des 9 15 et 17 octobre 2012 et des 9 et

19 novembre 2012.

Si une erreur de badgeage ou un oubli peuvent toujours arriver, la fréquence des anomalies constatées nous interdit de considérer qu’il pourrait s’agir effectivement en l’espèce de simples erreurs.

Ces fraudes récurrentes consacrent la violation du principe «’temps badgé égal temps travaillé’» et des dispositions existantes au sein du groupe Audiens résultant’:

. du chapitre 3 de l’accord d’entreprise du groupe Audiens du 7 janvier 2004,

. et du règlement intérieur.

Au-delà du non-respect répété des dispositions de nos accords d’entreprise, votre comportement s’inscrit en opposition avec le principe de confiance sur lequel est fondé notre règlement intérieur.

Nous vous rappelons à cet égard que les fraudes, tentatives de fraude de pointage ou oublis répétitifs de pointer sont susceptibles selon le chapitre 1 alinéa 1.4 du règlement intérieur du Groupe Audiens de donner lieu à sanction.

En l’état des 19 fraudes constatées, vous comprendrez que nous n’avons d’autre possibilité que de mettre fin immédiatement à notre relation de travail et à vous licencier pour faute grave sans préavis ni indemnité (‘)’».

Le 10 juin 2013, M. X a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt aux fins notamment d’obtenir la nullité de son licenciement et la requalification de son contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée.

SUR CE,

Sur l’intervention volontaire du syndicat Info’com-CGT/CSTP’:

L’association Groupe Audiens demande de dire irrecevable l’intervention volontaire du Syndicat Info’com-CGT/CSTP.

Elle explique que l’intervention du Syndicat Info’com-CGT/CSTP pour la première fois devant la cour est exclusivement dictée par le fait que M. Z, qui était membre du syndicat CGT des Personnels du groupe Audiens a rejoint le syndicat Info’com-CGT/CSTP. Elle soutient que cette démarche est choquante et que l’intervention est en tout état de cause irrecevable, à tout le moins en ce que le syndicat soulève des arguments qui n’ont pas été soulevés par le salarié ni en première instance, ni en appel’; qu’en effet, l’opposabilité du règlement intérieur à M. X n’a jamais été contestée par ce dernier.

En réplique, le Syndicat Info’com-CGT/CSTP expose que l’action du syndicat est recevable pour la première fois devant la cour d’appel.

L’article L. 2132-3 du code du travail stipule que les syndicats professionnels ont le droit d’agir en justice et qu’ils peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent.

En application de l’article L. 325 du code de procédure civile, l’intervention n’est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

L’intervention volontaire est possible, même pour la première fois en cause d’appel.

Dès lors que les éventuels manquements de l’employeur constatés dans la présente procédure peuvent avoir des conséquences sur l’intérêt collectif de la profession, l’intervention volontaire du syndicat Info’com-CGT/CSTP’est recevable.

Sur la demande d’indemnité de requalification’:

M. X invoque les articles L. 1242-1, L. 1242-2, L. 1245-1 et L. 1245-2 du code du travail et expose que son premier contrat de travail à durée déterminée indique le motif suivant’: «’remplacement de salarié en attente d’embauche’»’; qu’en réalité, le poste qu’il a occupé aurait dû être immédiatement pourvu par un salarié en contrat de travail à durée indéterminée’; qu’au surplus, l’association Groupe Audiens, qui, à la fin de son contrat de travail à durée déterminée, l’a recruté pour le remplacer au poste qu’il occupait déjà, a, en réalité, utilisé le contrat d’intérimaire comme une période d’essai en plus de la période d’essai déjà incluse au contrat de travail à durée indéterminée finalement signé.

Pour sa part, l’association Groupe Audiens expose que M. X n’a soulevé de difficulté que tardivement, ce qui montre qu’il admettait lui-même que son contrat était régulier. Subsidiairement, elle demande la réduction des prétentions du salarié à un mois de salaire tel qu’elle en a déterminé l’évaluation.

A tort, le salarié, qui a bénéficié d’un contrat d’intérim et non d’un contrat à durée déterminée, sollicite la requalification de la relation contractuelle en se fondant sur les textes relatifs au contrat à durée déterminée.

La cour saisie de la demande de requalification d’un contrat d’intérim se doit d’appliquer les textes adéquats.

Il ressort des articles L. 1251-5 et L. 1251-6 du code du travail qu’un contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice et que les cas de recours sont limitativement prévus par la loi.

Les articles L. 1245-40 et L. 1245-41 sanctionnent un manquement à ces obligations par une requalification du contrat de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée et par une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.

En cas de litige sur le motif du recours au travail temporaire, il incombe à l’entreprise utilisatrice de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat de mission.

En l’espèce, M. X a été amené à travailler pour l’intimée pour accomplir «’diverses tâches’» du 18 juillet 2011 au 16 septembre 2011 par contrat de mission temporaire conclu entre l’association Groupe Audiens et la société Eliness (entreprise de travail temporaire). Le motif alors présenté était le suivant’: «’remplacement de salarié en attente d’embauche’» (pièce 1 E).

La société, qui se contente d’alléguer que si M. X s’est abstenu de contester la régularité de son contrat de mission temporaire, «’c’est tout simplement parce que le contrat querellé répond à l’ensemble des exigences liées à sa nature’», ne répond pas à l’exigence probatoire attendue d’elle. En particulier, l’association Groupe Audiens devait établir la réalité du motif énoncé dans le contrat de mission, ce qu’elle ne fait pas.

De là il suit que le jugement sera confirmé en son principe, en ce qu’il est entré en voie de condamnation. En revanche, M. X n’établit pas la réalité d’un préjudice qui serait supérieur à un

mois de salaire. Dès lors, il conviendra d’infirmer le jugement en son quantum et, statuant à nouveau, de condamner l’association Groupe Audiens à payer à M. X une indemnité de requalification de 2 326,41 euros.

Sur la nullité du licenciement de M. X’:

M. X soutient que son licenciement est nul’:

. pour un motif discriminatoire en raison de son état de santé,

. parce qu’il est fondé sur des données recueillies illégalement,

. pour défaut d’indication préalable des motifs précis du licenciement.

L’association Groupe Audiens conteste la demande d’annulation pour chacun des moyens présentés par le salarié.

Sur le motif discriminatoire’:

M. X présente son argumentation en sept points en invoquant’:

. le fait que dès la transmission de son premier arrêt de travail qui a immédiatement été qualifié d’accident du travail par le personnel en charge de l’infirmerie au sein de l’entreprise, l’employeur ne pouvait ignorer le caractère d’accident du travail dont il était victime,

. la proximité temporelle entre l’annonce de son départ en congé maladie pour une durée de 6 mois en date du 9 janvier 2013 et l’engagement de la procédure de licenciement le 27 février 2013,

. le fait que la société ne pouvait légalement utiliser les horaires de passage en caisse du restaurant de l’entreprise dans le but de contrôler le temps de travail des salariés,

. le fait que la réalité des reproches qui lui sont adressés dans la lettre de licenciement ne sont pas établis’; qu’en effet, le logiciel Octime était défectueux et qu’il a dû demander le changement de son badge à plusieurs reprises,

. le fait que l’article 15.4 de l’accord d’entreprise n’a pas été respecté et qu’il n’a jamais été informé avant son licenciement, des anomalies constatées concernant le passage de son badge,

. le fait que l’article 13 du règlement intérieur prévoit que seules les fraudes ou les oublis répétés de pointer sont susceptibles de sanction’; qu’en l’espèce, il ne peut se voir reprocher un oubli de pointer puisqu’il passait son badge à la pause de midi sur la pointeuse’; que cependant, il existe des anomalies entre les horaires de la pointeuse et les horaires de passage en caisse à la cantine’; qu’il ne saurait être accusé de frauder,

. le fait que si, par extraordinaire, les faits devaient être considérés comme établis, ils étaient trop mineurs pour justifier un licenciement.

Synthétisant son propos, M. X soutient qu’il existe une présomption de discrimination en raison de son état de santé résultant’:

. d’une part de la proximité temporelle entre la procédure de licenciement et l’annonce de son congé maladie,

. d’autre part de ce que les faits qui lui sont reprochés dans la lettre de licenciement ne sont pas

établis.

En réplique, l’association Groupe Audiens expose que M. X multiplie les allégations inexactes et soutient que le salarié n’a pas hésité à déclarer un accident du travail radicalement inexistant exclusivement pour tenter de dissuader l’employeur d’user de son pouvoir disciplinaire quand il découvrirait inévitablement les fraudes commises. Elle rappelle que la procédure de licenciement a été initiée le 27 février 2013 et qu’à cette date aucun élément ne pouvait laisser supposer qu’il serait arrêté au mois de juin 2013, les arrêts qui lui ont été délivrés l’étant pour 15 jours. Elle précise que c’est à la suite d’un échange entre M. X et son supérieur, le 3 janvier 2013, relatif au problème de badgeage qui s’était produit la veille, que des recherches ont été faites mettant ainsi à jour les fraudes et leur ampleur’; que ces recherches et recoupements ont pris plusieurs semaines. Elle expose que les fraudes invoquées à l’appui du licenciement sont établies et constituent des violations indiscutables de l’accord d’entreprise du 7 janvier 2004 et du règlement intérieur’; que M. X ne peut se retrancher derrière des difficultés liées au logiciel de gestion du temps pour tenter de se dédouaner’; qu’en effet,

M. X a été convoqué plusieurs fois en entretien préalable et il a systématiquement refusé de s’y soumettre’; que ce n’est que 6 mois après son licenciement qu’il a invoqué une prétendue défaillance du logiciel Octime’; qu’au demeurant, la défaillance alléguée n’est pas établie et qu’elle n’est de toutes façons pas susceptible de l’exonérer.

L’article L. 1132-1 du code du travail dispose qu’aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison (‘) de son état de santé (‘).

Sur le terrain de la preuve, il n’appartient pas au salarié qui s’estime victime d’une discrimination d’en prouver l’existence. Suivant l’article L. 1134-1, il doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. Au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Schématiquement, M. X voit dans la proximité temporelle entre la procédure de licenciement et l’annonce de son congé maladie et le fait que les griefs qui lui sont reprochés dans la lettre de licenciement ne sont pas établis les éléments qui font présumer l’existence d’une discrimination.

Il n’est en rien établi que le 9 janvier 2013, l’employeur était déjà informé que M. X serait arrêté pour 6 mois. La pièce 3 du salarié montre au contraire que le 9 janvier 2013, M. X n’était arrêté que jusqu’au 16 janvier 2013. Les avis d’arrêts de travail qu’il produit en pièce 3 sont des avis qui prolongent ses arrêts, généralement de 15 jours en 15 jours’:

. avis d’arrêt de travail initial le 9 janvier 2013 jusqu’au 16 janvier 2013,

. 1er avis de prolongation du 16 janvier 2013 jusqu’au 31 janvier 2013,

. 2e avis de prolongation du 31 janvier 2013 jusqu’au 15 février 2013,

. 3e avis de prolongation du 15 février 2013 jusqu’au 1er mars 2013,

. 4e avis de prolongation du 1er mars 2013 jusqu’au 22 mars 2013,

. 5e avis de prolongation non daté prescrit jusqu’au 3 avril 2013,

. 6e avis de prolongation du 3 avril 2013 jusqu’au 25 avril 2013,

. 7e avis de prolongation du 23 avril 2013 jusqu’au 14 juin 2013.

La procédure de licenciement a, pour sa part, été engagée par courrier du 27 février 2013 (pièce 4 S), après la réception du 3e avis de prolongation qui prescrivait un arrêt de travail jusqu’au 1er mars 2013. Elle a donné lieu à un licenciement prononcé par lettre du 17 mai 2013 pour faute grave.

La lettre de licenciement évoque un événement du 2 janvier 2013 (un défaut de débageage) présenté comme le facteur ayant déterminé l’employeur à procéder à des recherches d’événements similaires au cours de l’année précédente. Dans son courrier de contestation du 20 novembre 2013, M. X revient d’ailleurs sur cet événement en indiquant’: «’Quant aux événements du 2 janvier 2013, je n’ai enfreint aucun règlement. Il s’agit du simple oubli de mon badge qui était resté dans ma veste à mon poste de travail. De retour à mon poste, j’ai simplement oublié de faire la régularisation, que j’ai faite le lendemain après l’entretien avec M. A (note de la cour’: M. A était alors le supérieur hiérarchique de M. X), qui a adopté à cette occasion une attitude particulièrement discourtoise et irrespectueuse à mon égard.’» (pièce 8 E). Il faut y voir le signe évident que l’événement du 2 janvier 2013 a bien eu lieu et qu’il a eu pour conséquence, le lendemain, une vive discussion entre le salarié et son supérieur hiérarchique.

Ainsi, le facteur qui, le 2 janvier 2013, a déclenché la procédure et qui, plus tard, le 27 février 2013, a conduit à l’engagement d’une procédure de licenciement, est antérieur au premier avis d’arrêt de travail du 9 février 2013. Il ne peut donc, par définition, avoir été inspiré par une discrimination liée à l’état de santé du salarié.

Par conséquent, les faits présentés par le salarié ne font pas présumer une discrimination liée à l’état de santé.

Sur le recueil illicite de données’:

Il n’est pas discuté que c’est par un rapprochement entre d’une part la liste des badgeages de M. X entre janvier 2012 et janvier 2013, telle que répertoriée par le logiciel Octime (pièce 11 E) et d’autre part l’historique de la fréquentation, par le salarié, de la cantine de la société (pièce 12 E), que l’association Groupe Audiens a pu identifier ce qu’elle présente, dans la lettre de licenciement, comme des irrégularités.

C’est sur la base de cette constatation que M. X présente son deuxième moyen de nullité. Plus précisément, M. X se fonde sur les articles 1 à 7 de la norme simplifiée de la CNIL et l’article 6 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Il soutient qu’en l’espèce, l’association Groupe Audiens a installé un système de traitement des données à l’intérieur même du lieu de travail, la cantine, ce qui est illégal’; qu’au surplus, l’association Groupe Audiens ne rapporte pas la preuve d’une déclaration à la CNIL concernant son dispositif de traitement des données relatives à la restauration d’entreprise, en déclarant que ce dispositif aurait non seulement pour finalité de faciliter le paiement lors du passage en caisse mais également celle de contrôler le temps de travail des salariés’; qu’en outre, le groupe ne démontre pas avoir informé les salariés d’une telle finalité des données recueillies par ce système de traitement des données. Il conclut en indiquant que les données n’auraient pas dû être conservées plus de trois mois et que le licenciement fondé sur des données recueillies illégalement doit nécessairement être déclaré nul ou, à défaut, sans cause réelle et sérieuse.

En réplique, l’association Groupe Audiens objecte qu’elle a déclaré au titre de la norme simplifiée de la CNIL l’utilisation d’un logiciel dédié, dont il est bien précisé qu’il a trait à la restauration mais aussi à la gestion des horaires.

En l’espèce, par sa pièce 18 (récépissé de déclaration à la CNIL), l’association Groupe Audiens montre qu’elle a procédé à la déclaration litigieuse le 16 mai 2005.

Il résulte de la norme simplifiée 42 de la CNIL que les données de badgeage sont conservées de la façon suivante’:

. s’agissant des éléments d’identification’: 5 ans après le départ du salarié.

. s’agissant des éléments relatifs aux déplacements des personnes’: 3 mois.

. traitement ayant pour finalité le contrôle du temps de travail : 5 ans.

. données relatives aux motifs d’absence : 5 ans (sauf dispositions législatives contraires).

. données relatives au paiement des repas : 3 mois pour les données monétiques et 5 ans en cas de paiement par retenue sur salaire.

Comme il résulte de la déclaration faite par l’employeur à la CNIL le 16 mai 2005 (cf. sa pièce 18), la finalité déclarée était la suivante’: «’CONTROLE ACCES AUX LOCAUX GESTION HORAIRES ET RESTAURATION’». Cet intitulé permet de rattacher la finalité du contrôle et des données au «’Traitement ayant pour finalité le contrôle du temps de travail’» et, par conséquent, pouvait être conservé durant 5 ans et non 3 mois.

Par ailleurs, M. X ne peut sérieusement soutenir qu’il n’avait pas été averti de la finalité du badgeage dès lors que ‘ notamment ‘ l’accord d’entreprise du 7 janvier 2004 (pièce 13 E p. 13 et p. 17) prévoyait’:

. en son article 13.1′:

«’13.1. Obligation pour tous de badger

Conformément à l’article L. 620-2 du code du travail, le temps de travail est décompté individuellement. A cet effet, un dispositif de pointage par badge est appliqué pour l’ensemble du personnel, permettant ainsi la mise en place des horaires individualisés (‘)’».

. en son article 15′:

«’Article 15 Principe’: temps badgé = temps travaillé

15.1. Utilisation du badge

L’utilisation du badge (‘) permet la mise en place des horaires individualisés au bénéfice de l’ensemble des salariés.

Un tel système repose sur l’autodiscipline, la responsabilité individuelle et collective et la confiance.

(‘)

Dans une même journée, le nombre de pointages n’est pas limité. Tout enregistrement «’entrée’» doit être suivi d’un enregistrement «’sortie’» dans la même journée’; tout enregistrement «’sortie’» doit être précédé d’un enregistrement «’entrée’» dans la même journée (‘)

(‘)

15.4. Régularisation de compteur

En cas d’anomalie sur compteur ou oubli de badger, une procédure d’information du salarié concerné sera mise en place’; le compteur du salarié sera rectifié sur présentation d’une fiche de régularisation horaires validée par son responsable de service ou de département.’»

Compte tenu des éléments qui précèdent, le recueil des données ayant fondé le licenciement n’est pas illicite de sorte que le moyen de nullité présenté par M. X ne peut prospérer.

Sur le défaut d’indication préalable des motifs du licenciement’:

M. X se fonde sur l’article 34 de la convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993. Il expose que la cour de cassation a jugé, dans un arrêt 11-25646 du 9 janvier 2013, que les droits du salarié tels que déterminés par cet article 34 sont supérieurs à ceux garantis par la loi en prescrivant que les salariés doivent ‘ avant même leur entretien préalable ‘ être avisés par écrit des motifs de la mesure envisagée par l’employeur’; que par ailleurs, l’article 7 de la convention OIT 158, directement applicable, impose une telle information avant l’entretien préalable. Il revient enfin sur l’article L. 1232-2 du code du travail et affirme que cette disposition doit être interprétée comme imposant à l’employeur de préciser la consistance des griefs avant l’entretien préalable de sorte que le salarié puisse utilement préparer sa défense, entendue comme garantie substantielle’; qu’un manquement à l’obligation d’informer le salarié avant l’entretien préalable est une violation de l’article 7 de la convention OIT 158 ‘ qui est une garantie fondamentale ‘ et ne peut être sanctionnée par une simple irrégularité de procédure dès lors qu’elle vicie le licenciement lui-même’; qu’ainsi la seule sanction envisageable est la nullité du licenciement.

En réplique, l’association Groupe Audiens conteste cette analyse et estime au contraire que les droits de M. X n’ont pas été bafoués. Elle rappelle que M. X a été convoqué à un entretien préalable par courrier du 27 février 2013 par un courrier très précis mentionnant le fait que 19 infractions aux horaires ont été découvertes, que cela concerne la période de janvier 2012 à janvier 2013, que ces infractions répétées relatives aux horaires individualisés conduisent à une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement’; que M. X a fait savoir qu’il ne pouvait pas se présenter à cause d’intempéries’; qu’un nouvel entretien a en conséquence été fixé au 27 mars pour lequel le salarié a reçu une nouvelle convocation reprenant les mêmes éléments que la première’; que M. X a fait savoir à nouveau qu’il ne pouvait pas se présenter’; que l’employeur a une nouvelle fois fixé un nouvel entretien au 24 avril en laissant au salarié la possibilité au salarié de présenter ses observations par écrit au plus tard le 30 avril’; qu’en dépit de cela, M. X est demeuré totalement silencieux et que c’est dans ces circonstances que le licenciement a finalement été prononcé.

Le code du travail prévoit, en son article L. 1232-2 que «’L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable.

La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l’objet de la convocation.

L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation.’»

L’article R. 1232-1 prévoit quant à lui’: «’La lettre de convocation prévue à l’article L. 1232-2 indique l’objet de l’entretien entre le salarié et l’employeur.

Elle précise la date, l’heure et le lieu de cet entretien.

Elle rappelle que le salarié peut se faire assister pour cet entretien par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise ou, en l’absence d’institutions représentatives dans l’entreprise, par un conseiller du salarié.’»

Il ne ressort d’aucun de ces textes que la lettre de convocation à l’entretien préalable doit mentionner les motifs qui font envisager le licenciement. Les droits de la défense sont respectés dès lors que le salarié a le droit d’être assisté au cours de l’entretien et qu’il peut se défendre contre les griefs formulés par l’employeur au cours de cet entretien. Les dispositions de l’article 7 de la convention 158 de l’OIT sont de ce chef respectées.

Toutefois, il importe de relever que la relation de travail liant M. X à l’association Groupe Audiens était régie par la convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993 dont l’article 34 prévoit’:

«’Les différentes mesures disciplinaires sont l’avertissement, le blâme, la mise à pied limitée à 5 jours ouvrés, le licenciement avec préavis et indemnité de licenciement, et, en tenant compte des circonstances et du contexte, le licenciement pour faute grave sans préavis ni indemnité de licenciement, le licenciement pour faute lourde privatif de toute indemnité.

Les amendes ou autres sanctions pécuniaires sont interdites ; toute disposition ou stipulation contraire est réputée non écrite. La mise à pied qui constitue, à titre de sanction, une suspension temporaire du contrat de travail sans rémunération, n’est pas une sanction pécuniaire.

Tout licenciement intervenant après la période d’essai, telle qu’elle est définie à l’alinéa 1er de l’article 10, devra être motivé par écrit.

Le motif de la mesure disciplinaire envisagée par la direction doit être notifié par écrit à l’intéressé avant que la mesure entre en application.

Tout agent doit être entendu par la direction avant une mesure disciplinaire pour obtenir la justification du motif invoqué et faire valoir ses explications.

Il peut se faire assister par un délégué du personnel de son choix, un délégué syndical de l’entreprise concernée,ou une autre personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise.

Si dans l’année suivant l’avertissement, les deux ans suivant le blâme, les trois ans suivant la mise à pied, l’intéressé n’a fait l’objet d’aucune mesure disciplinaire, la sanction est effacée du dossier.’»

C’est donc à raison que M. X se prévaut de garanties conventionnelles supérieures aux garanties offertes par la loi. En effet, l’article 34 de la convention collective nationale du travail du personnel des institutions de retraites complémentaires du 9 décembre 1993 prévoit en ses alinéas 4 et 5 que le motif de la mesure disciplinaire envisagée par la direction doit être notifié par écrit à l’intéressé avant que la mesure entre en application et que tout agent doit être entendu par la direction avant une mesure disciplinaire pour obtenir la justification du motif invoqué et faire valoir ses explications. Il résulte de ces dispositions, qui concernent l’ensemble des mesures disciplinaires, que l’employeur doit, antérieurement à l’entretien préalable au licenciement pour motif disciplinaire, notifier au salarié par écrit les motifs de la mesure qu’il envisage. Et ce texte, qui institue une protection des droits de la défense supérieure à celle prévue par la loi, constitue une garantie de fond.

En l’espèce, il ressort des convocations du salarié en vue d’un entretien préalable (cf. pièce 6 E correspondant aux convocations des 27 février 2013, 14 mars 2013 et 12 avril 2013) que le salarié était ainsi avisé’: «'(‘) Votre responsable hiérarchique nous a informés que le mercredi 2 janvier

2013 que vous aviez enfreint les règles relatives aux horaires individualisés et qu’il vous avait reçu à cet effet le 3 janvier 2013. Vous lui avez confirmé avoir pris une pause déjeuner d’une demi-heure sans débadger comme le prévoit le règlement. Vous avez d’ailleurs à cet effet établi une régularisation manuelle d’horaires. Cette information nous a amenés à procéder à des vérifications qui nous ont conduit à constater 19 infractions aux horaires entre janvier 2012 et janvier 2013. Ces infractions répétées relatives aux horaires individualisés nous amènent à envisager à votre encontre une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu’au licenciement. Nous vous rappelons que vous avez la possibilité d’être accompagné d’une personne de votre choix appartenant au personnel de l’entreprise (‘)’»

Ainsi avisé, le salarié avait connaissance, avant l’entretien préalable, des griefs qui déterminaient l’employeur à envisager une sanction, à savoir un manquement, à 19 reprises entre janvier 2012 et janvier 2013, à ses obligations relatives au badgeage.

Même si les 19 infractions n’étaient pas mentionnées avec précision alors qu’elles étaient nécessairement connues de l’employeur puisqu’il les avait dénombrées (elles sont précisément reprises dans la lettre de licenciement’: «’17 et 27 janvier 2012, des 6 et 29 février 2012, des 6 et 29 mars 2012, des 6 avril 2012, des 9 et 24 mai 2012, des 1er juin 2012, du 20 juillet 2012, des 10 et 13 août 2012, du 21 septembre 2012, des 9 15 et 17 octobre 2012 et des 9 et 19 novembre 2012.’»), l’employeur a satisfait à son obligation conventionnelle en avisant le salarié, avant la tenue de l’entretien préalable, des motifs pour lesquels il envisageait une sanction.

De là il suit que le moyen présenté au soutien de la demande d’annulation du licenciement tiré de l’absence d’énonciation des griefs avant l’entretien préalable ne peut prospérer

En synthèse de ce qui précède’:

Les moyens de nullité présentés par M. X n’ayant pas été accueillis, il conviendra de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté le salarié de ce chef de demande et en ce qu’il l’a débouté de sa demande de réintégration.

Sur la cause réelle et sérieuse du licenciement’:

Après avoir rappelé les règles régissant le licenciement pour faute grave, M. X conteste les faits qui lui sont reprochés et estime en outre que la sanction prononcée à son endroit est disproportionnée.

En réplique, l’association Groupe Audiens expose que les défaillances du système de badgeage à l’époque des faits incriminés, telles qu’invoquées par le salarié, n’ont pas empêché ledit système de bien enregistrer les badgeages de M. X’; que ce dernier n’a entendu régulariser ses manquements que lorsque, le 3 janvier 2013, son supérieur le lui a demandé’; que la fraude est avérée’; que sa gravité n’est pas discutable, le comportement de M. X révélant sa malhonnêteté.

La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits personnellement imputables au salarié, qui doivent être d’une importance telle qu’ils rendent impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.

Le licenciement pour faute grave implique néanmoins une réaction immédiate de l’employeur, la procédure de licenciement devant être engagée dans des délais restreints et le licenciement devant intervenir rapidement.

En cas de faute grave, il appartient à l’employeur d’établir les griefs qu’il reproche à son salarié.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe exclusivement à l’employeur et il appartient

au juge du contrat de travail d’apprécier, au vu des éléments de preuve figurant au dossier, si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, à raison des fonctions qui lui sont confiées par son contrat individuel de travail, et d’une gravité suffisante pour justifier l’éviction immédiate du salarié de l’entreprise, le doute devant bénéficier au salarié.

Au soutien de sa demande le salarié ne se prévaut pas de l’inopposabilité du règlement intérieur. Dès lors que nul ne plaide par procureur ce moyen ne sera pas examiné à ce stade.

L’employeur, en engageant la procédure de licenciement le 27 février 2013, n’a pas manqué à son obligation de célérité s’agissant de fait qui lui ont été révélés pour partie le 2 janvier 2013 et qui n’ont pu être complètement identifiés qu’au terme d’investigations (rapprochements informatiques) qui lui ont pris du temps.

De fait, le rapprochement des pièces 11 et 12 de l’employeur (déjà citées) permet de montrer que M. X n’a pas débadgé en se rendant à la cantine et n’a pas rebadgé en reprenant le travail après s’être restauré. Or, comme le montre l’accord d’entreprise du 7 janvier 2004 (pièce 13 E déjà citée), M. X ne pouvait ignorer la finalité du badgeage, notamment en ce qu’il déterminait son volume de temps de travail effectif.

Certes, le salarié présente en pièce 11 une abondante correspondance montrant que le serveur d’Octime rencontrait très régulièrement des difficultés techniques et ce, depuis 2009. Par ces pièces, M. X montre effectivement que sur la période incriminée (entre janvier 2012 et janvier 2013), il a été destinataire de 7 messages internes tous rédigés de la même façon («’Bonjour, Le serveur d’Octime rencontre actuellement des difficultés techniques. Les badges remonteront automatiquement, ils sont pris en compte malgré l’absence d’affichage dans Octime’»). Lesdits messages sont datés des’:

. 15 février 2012,

. 16 février 2012,

. 23 février 2012,

. 15 mars 2012,

. 29 mars 2012,

. 15 avril 2012,

. 10 janvier 2013.

Mais d’une part, le problème d’Octime tenait manifestement en un problème d’affichage qui n’affectait pas les relevés d’heure puisque les messages précisaient «’les badges remontent automatiquement, ils sont pris en compte (‘)’». D’autre part, les messages reçus par M. X les 15 février 2012, 16 février 2012, 23 février 2012, 15 mars 2012, 29 mars 2012, 15 avril 2012, 10 janvier 2013 ne coïncident pas avec les dates des irrégularités constatées les 17 et 27 janvier 2012, les 6 et 29 février 2012, le 6 mars 2012, le 6 avril 2012, des 9 et 24 mai 2012, le 1er juin 2012, le 20 juillet 2012, les 10 et 13 août 2012, le 21 septembre 2012, les 9, 15 et 17 octobre 2012 et les 9 et 19 novembre 2012. Seule la journée du 29 mars 2012 ‘ pour laquelle un manquement est reproché au salarié ‘ coïncide avec un message d’anomalie.

Ainsi, les manquements du salarié sont-ils établis.

Le fait que le règlement intérieur soit inopposable au salarié ne privait pas l’employeur, qui se

prévalait aussi de l’accord d’entreprise du 7 janvier 2004, de sanctionner une faute indépendamment dudit règlement intérieur.

En revanche, ainsi que l’a relevé à juste titre le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, la sanction ultime que constitue le licenciement de M. X ‘ à plus forte raison pour faute grave ‘ n’était pas justifiée, s’agissant d’un salarié qui jamais auparavant n’avait fait l’objet de sanctions et qui travaillait pour la société depuis juillet 2011.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a dit le licenciement de M. X sans cause réelle et sérieuse.

M. X peut donc prétendre à ses indemnités de rupture ainsi qu’à une indemnité pour licenciement abusif, sur le fondement de l’article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable au présent litige, dès lors qu’il jouit d’une ancienneté inférieure à 2 ans (en l’occurrence 1 an et 10 mois).

En discussion entre les parties, la référence salariale de M. X doit être fixée à la somme de 2 326,41 euros ainsi que le soutient l’employeur.

Sur cette base, et sur la base de l’ancienneté retenue, M. X peut prétendre’à une indemnité compensatrice de préavis d’un mois, soit 2 326,41 euros outre 232,64 euros au titre des congés payés afférents et à une indemnité de licenciement de 891,79 euros.

En ce qui concerne le préjudice consécutif à la perte, par M. X, de son emploi par suite d’un licenciement abusif et compte tenu de son ancienneté, de son niveau de rémunération, de ce qu’il n’a pas retrouvé d’emploi en contrat de travail à durée indéterminée, de son âge (pour être né en 1965, M. X avait 48 ans lors de son licenciement), il lui sera alloué une indemnité de

5 000 euros.

Dès lors, le jugement sera de ces chefs infirmé et statuant à nouveau, l’association Groupe Audiens sera condamnée à payer à M. X’:

. 2 326,41 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 232,64 euros au titre des congés payés afférents,

. 891,79 euros à titre d’indemnité de licenciement,

. 5 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement abusif.

Sur la demande de dommages et intérêts du syndicat CGT des personnels Groupe Audiens’:

Pour solliciter l’infirmation du jugement qui l’a condamnée à payer au syndicat CGT des personnels Groupe Audiens’la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts, l’employeur se fonde sur le caractère illégitime des demandes du salarié.

Dès lors qu’il a été établi que l’employeur n’avait pas respecté les règles relatives au recours au travail temporaire, l’atteinte à l’intérêt collectif des salariés représentés par le syndicat CGT des personnels Groupe Audiens’est établie.

Le jugement qui a justement évalué le préjudice sera confirmé en ce qu’il a alloué au syndicat CGT des personnels Groupe Audiens’la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts et la même somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur la demande de dommages et intérêts du syndicat Info’com-CGT/CSTP’:

Le syndicat Info’com-CGT/CSTP’soutient que les manquements du Groupe Audiens relatifs à l’inopposabilité du règlement intérieur, au licenciement discriminatoire et au recours au travail intérimaire ont causé à l’intérêt collectif de la profession qu’il représente un préjudice qui doit être réparé.

L’article L. 1321-4 du code du travail dispose que «’Le règlement intérieur ne peut être introduit qu’après avoir été soumis à l’avis du comité social et économique.

Le règlement intérieur indique la date de son entrée en vigueur. Cette date doit être postérieure d’un mois à l’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité.

En même temps qu’il fait l’objet des mesures de publicité, le règlement intérieur, accompagné de l’avis du comité social et économique, est communiqué à l’inspecteur du travail.

Ces dispositions s’appliquent également en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur.’»

L’article R. 1321-2 du code du travail prévoit quant à lui que «’le règlement intérieur est déposé, en application du deuxième alinéa de l’article L. 1321-4, au greffe du conseil de prud’hommes du ressort de l’entreprise ou de l’établissement.’»

Il ressort de ces textes que les règlements intérieurs sont soumis à des formalités de dépôt et de publicité. Plus précisément, s’agissant des formalités de dépôt, le règlement intérieur doit être déposé au greffe du conseil de prud’hommes dans le ressort duquel est situé l’établissement ou le siège de l’entreprise. L’association Groupe Audiens ayant son établissement à Vanves, elle aurait dû déposer son règlement intérieur au conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt et non à celui de Nanterre.

L’entrée en vigueur du règlement intérieur est conditionnée par le respect des formalités de dépôt et de publicité. Or, celles-ci déterminent le point de départ du délai au terme duquel le règlement pourra entrer en vigueur. D’ailleurs, l’article L. 1321-4 du code du travail prévoit que le règlement intérieur indique sa date d’entrée en vigueur qui doit être postérieure d’un mois à l’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité.

Selon l’article R. 1321-3 ce délai court à compter de la dernière en date des formalités. Et en cas de défaut d’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité, le règlement intérieur ne peut entrer en vigueur et ses dispositions sont inopposables aux salariés.

Comme constaté plus haut, l’association Groupe Audiens n’a pas déposé son règlement intérieur au greffe du conseil de prud’hommes compétent. Il en résulte que le délai au terme duquel le règlement intérieur pourrait entrer en vigueur n’a pas commencé à courir. Ainsi, c’est à juste titre que le Syndicat Info’com-CGT/CSTP expose que le règlement intérieur est inopposable aux salariés.

Si le licenciement n’a pas été jugé discriminatoire, il a été établi que l’employeur n’a pas respecté les règles de recours au travail temporaire.

Les manquements de l’employeur ont causé à l’intérêt collectif représenté par le Syndicat Info’com-CGT/CSTP un préjudice qui sera réparé par l’allocation d’une somme de 500 euros.

Sur les dépens et les frais irrépétibles’:

Succombant, l’association Groupe Audiens sera condamnée aux dépens.

Il conviendra de condamner l’association Groupe Audiens à payer à M. X une indemnité de 2

950 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d’appel.

Il conviendra de condamner l’association Groupe Audiens à payer au Syndicat Info’com-CGT/CSTP une indemnité sur le fondement de l’article 700 code de procédure civile d’un montant de 500 euros.

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et par arrêt réputé contradictoire, la cour’:

DÉCLARE recevable l’intervention volontaire du Syndicat Info’com-CGT/CSTP,

INFIRME partiellement le jugement,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE l’association Groupe Audiens à payer à M. X’:

. 2 326,41 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 232,64 euros au titre des congés payés afférents,

. 891,79 euros à titre d’indemnité de licenciement,

. 5 000 euros à titre d’indemnité pour licenciement abusif,

. 2 326,41 euros à titre d’indemnité de requalification de son contrat de mission temporaire en contrat de travail à durée indéterminée,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

Y ajoutant’;

CONDAMNE l’association Groupe Audiens à payer au Syndicat Info’com-CGT/CSTP la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,

CONDAMNE l’association Groupe Audiens à payer à M. X la somme de 2 950 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d’appel,

CONDAMNE l’association Groupe Audiens à payer au Syndicat Info’com-CGT/CSTP la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE l’association Groupe Audiens aux dépens.

. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente et par Madame Dorothée MARCINEK, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

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